De facture plus classique que ses ouvrages précédents, ce quatrième opus célèbre l’habileté de Joseph Arthur à livrer quelques hymnes écorchés de toute beauté. On y décèle quelques une de ses chansons les plus émouvantes.


Depuis ses débuts fracassants sur le label Real World, on éprouve une tendresse particulière pour Joseph Arthur. Chaque nouvel album nous replonge 10 ans en arrière – déjà ! – et le souvenir d’une prestation solo renversante de “Mercedes”, rentrée depuis dans les annales de l’émission « Nulle part Ailleurs ». Ce soir là, mon vieux poste de télévision a miraculeusement tenu bon, victime de multiples surtensions, étrangement les mêmes que celles survenues lors du passage de l’ange J. Buckley pour son sacré “Hallelujah”…

Cruellement, on s’étonne toujours de constater que le natif d’Akron n’est jamais vraiment parvenu à percer ou acquérir la notoriété publique qu’il mériterait. Le destin aurait pu basculer autrement du temps de Redemption Son – une date culminante au Bataclan parisien augurait d’un futur radieux… Malheureusement le sort s’acharne contre lui. L’année suivante, son contrat sur le label de Peter Gabriel n’est pourtant pas reconduit, et le prive d’une distribution française. La parution en 2004 de l’indéterminé Our Shadows Will Remain consécutif à cette déroute, laisse entrevoir une période de doute artistique.
La sortie de ce quatrième opus rassure. Requinqué, notre garçon a récemment produit la divine Joan as Policeman et monté avec l’aide de quelques fidèles son propre label, Lonely Astronaut, où il entend désormais sortir ses disques à sa guise et signer à l’occasion quelques amis talentueux. Son prochain album est d’ailleurs d’ores et déjà programmé pour 2007.

Les disques du prince Arthur, trop souvent dilués dans une production futile, n’ont jamais vraiment été à la hauteur de ses performances acoustiques légendaires. Seule exception notable, le Vacancy EP (1999), son ouvrage le plus brut jusqu’ici, capturait avec éclat l’essence de son art. Entièrement produit et interprété de ses propres mains, Nuclear Daydream tend vers cette approche dépouillée, sans effets accessoires. Pourtant, Joseph Arthur tire de ce parti pris ses points faibles également. Il n’y a guère de remise en question sur le plan artistique. Joseph Arthur fait du “Joseph Arthur”, son modus operandi ne bouge d’un iota : des refrains exorcisés couchés sur une poignée d’arpèges, de temps à autres recouverts de radiations shoegazers. De prime abord, on en serait presque déçus de retrouver ces vieux artifices… pour finalement replonger de plein gré.

Nuclear Daydream est un peu comme un vieux chagrin d’amour qui revient à la charge. On a beau vouloir résister à ses vieilles ficelles de séduction que l’on connait par coeur, le risque de retomber dans le panneau à tout moment est réel. Même si son songwriting tourne en rond, Joseph Arthur est indéniablement en grande forme. La solide douzaine de compositions alignées confère au disque une homogénéité qu’on n’avait plus entendue depuis Come to Where I’m From. Avec “Enough To Get Away”, “You Are Free” ou encore le folk aérien d’“Electrical Storm”, St Joseph réitère la prouesse de pondre des pop songs miraculeuses du calibre d’“In the sun”. Sur d’autres titres de facture classique comme “Too Much to Hide”, la mise est sauvée grâce à son falsetto exceptionnel. Le registre vocal étendu de cette étrange progéniture de Leonard Cohen et Jeff Buckley, lui permet de vaquer du gospel (“Slide away”) à d’acrobatiques modulations basses et aiguës sans jamais perdre son aura hypnotique (“Woman”).

Frappé d’une clairvoyance harmonique innée, Joseph Arthur parvient encore une fois à faire renverser la vapeur et demeure l’un des rares artistes dans ce domaine de la pop à nous faire perdre l’équilibre.

– Le site du label Lonely Astronaut
– La page myspace de Joseph Arthur