Le maître du gimmick était aussi le maître du suspens. En effet, Alfred Hitchcock adorait jouer avec le public. Aussi introduisit-il le McGuffin dans son cinéma, un gimmick (selon sa propre définition, cf. les entretiens Hitchcock-Truffaut) qui n’avait d’autre fonction que de perdre le spectateur, en constituant l’épicentre d’une histoire dont seul le déroulement importait, et en aucun cas la chute. Et cet épicentre était interchangeable. Le McGuffin était, selon la légende, une machine à chasser le lion écossais qui, comme chacun le sait, n’existe pas. Dans North By Northwest (La Mort Aux Trousses), le traficant d’export-import aurait tout aussi bien trafiquer des armes, ou du fil écossais (qui n’existe pas plus que le lion), cela ne change strictement rien au film, c’était le McGuffin. Donc, toujours pour citer Alfred, « le McGuffin n’est rien ». Cécile Martin et Xavier Hémery, duo composant Sundayer, semblent connaître ce procédé sur le bout des doigts, en attestent le titre de leur second album, Mcguffin donc, et les superbes photos d’autoroutes américaines qui ornent le livret. Mais de là à faire le lien entre leur musique et le cinéma du plus Américain des réalisateurs anglais, il y a un gouffre que nous ne saurions franchir, on ne peut pas qualifier leur oeuvre de « rien ». En effet, Sundayer propose un mélange de folk-pop minimaliste, qui évoque Superflu à leurs débuts, un filet de musique qui, l’air de rien, touche par la gracilité qui s’en dégage. Certes, on peut toujours s’appesantir sur le chant assez limité de Cécile Martin – tant sur la voix que sur l’accent – car bien sûr tous les textes sont en anglais. L’avantage, c’est qu’on passe assez rapidement sur la facilité de certains textes. Non, ce qui séduit chez Sundayer, c’est cette façon de calmer les plus endurcis avec un air de ne pas y toucher, grâce à des arrangements réduits à l’extrême et à des mélodies emportées par le vent. Mcguffin est un disque de petit matin de printemps, un disque d’amoureux (pas d’amour), aussi agréable qu’un léger coup de soleil qui suit un pique-nique près d’une rivière perdue. Ni plus, ni moins. Quant au McGuffin du disque, on le cherche encore. McGuffin réussi selon la définition d’Alfred Hitchcock.

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