Michael Hurley est un singulier personnage. Premier album publié en 1964, premières reconnaissances dans le landernau folk dans la foulée, cet iconoclaste ne tardera pas à faire ses armes dans un Greenwich Village affamé d’excentriques. Hurley s’est fait remarquer tant par sa musique aride et irrévérencieuse que par son attitude totalement délurée. Se moquant des modes, s’asseyant sur les conventions, et tournant le dos à toute considération littéraire, Hurley aura toujours veillé à ce que son art ne ressemble à rien de connu. Aussi, de folk burlesque en blues éthylique, Hurley a fini par se constituer un avatar aussi célèbre pour ses chansons hallucinées que pour son côté ouvertement détaché de tout. Véritable légende aux Etats-Unis (entre autres faits d’armes, sa chanson “Griselda” fut reprise par Yo La Tengo sur l’album Fakebook) , Michael Hurley est un illustre inconnu dans nos contrées. Aujourd’hui âgé de 66 ans, ce vaillant papy folk sort aujourd’hui The Ancestral Swamp, son vingtième véritable album. The Ancestral Swamp est avant tout un authentique album de blues rustique, joué dans les traditions, la preuve incontestable que le blues noir et le folk blanc prennent leurs sources dans les mêmes terres hostiles. On croirait entendre ici un Robert Johnson revenu de l’enfer (et donc de tout), un Blind Willie Johnson qui s’évertuerait à faire un concours de chiques avec Woody Guthrie. The Ancestral Swamp, dans le style totalement désabusé si caractéristique de Hurley, au passage doté d’une voix délicieusement dévoyée, est un merveilleux brûlot qui renvoie tous les bluesmen de MTV à leurs chères études et qui surclasse définitivement tous les folkeux de pacotille qui n’ont retenu de cette musique campagnarde et rustre que le folklore et l’imagerie. Que ce soit à la guitare, au banjo ou au piano électrique, la musique de Michael Hurley est une leçon d’humilité infligée par un professeur qui se fout de son influence comme de sa première cuite. Incontournable.
– La page de Michael Hurley sur le site de Gnomonsong