Quand ils ne parrainent pas les jeunes pousses hexagonales (cf. plus bas l’album de Tigran Hamasyan), les frangins Moutin, peu enclins à la suffisance, enregistrent d’excellents albums avec leur Reunion Quartet. Cette fois-ci de l’autre côté de l’Atlantique, à New York pour la version studio/CD et à Chicago pour la version live/DVD. Heureuse initiative que ce disque double-face qui permet de mettre des images sur ce jazz virevoltant, d’en prendre la pleine mesure sur scène, lieu d’élection de la formation qui a sillonné les quatre coins du Monde depuis deux ans, quand bien même les prises studio ne suffiraient pas à convaincre de la fougue communicative des jumeaux. Pas un hasard si, parmi les compositions originales pleines d’aplomb, deux sont des reprises/hommages de John Coltrane et Charlie Parker (“Trane’s Medley » et “Bird’s Medley”), ces saxophonistes de renom étant une intarissable source d’inspiration pour la paire rythmique française (François à la contrebasse, Louis à la batterie). C’est à Rick Margitza qu’est confiée la lourde tâche de perpétuer le souffle des maîtres, un rôle qu’il endosse sans faillir avec son timbre rugueux et sa puissance expressive saisissante. Tandis que Pierre de Bethmann, au Fender Rhodes et piano (dont la sonorité trafiquée et vaguement métallique sur « Sharp Turns » n’est pas du meilleur effet), garde une main sur l’accélérateur alors que l’autre serait tentée de battre la cadence. Nulle révolution de fond ici, mais une belle propension à faire du groove et du dynamisme des lignes directrices autour desquelles le quartet échafaude un univers immédiatement familier, généreux en rebondissements et bien plus retors qu’il n’y paraît.
– Le site du Moutin Reunion Quartet.