Quatre ans après Oh ! Mighty Engine, le respecté songwriter de feu Slowdive et Mojave 3 publie son troisième recueil en solitaire de balades rurales cotonneuses.
Qu’elles paraissent lointaines, les effluves shoegazing de Slowdive. Retiré dans sa campagne anglaise de l’Oxfordshire, le plancher des vaches est depuis quelques temps déjà le quotidien de Neil Halstead. L’illustre leader de feu Mojave 3 et Slowdive, se complait en solo dans une pop/folk pastorale, où le volume sonore est si peu élevé qu’il pourrait faire passer Belle & Sebastian pour Motorhead. Ses deux premiers albums, Sleeping On Roads (4AD, 2002) et Oh ! Mighty Engine (Brushfire Records, 2008) témoignaient chez le musicien d’un prégnant besoin d’apaisement, l’épure d’une guitare sèche comme échappatoire, sans toutefois encore jusqu’ici égaler l’élégance folk vespérale de Mojave 3. Un point désormais rectifié sur ce troisième opus solo.
Alors que l’intéressé évoquait une possible reformation de Slowdive – histoire de faire mousser un peu les fans avant la sortie de son nouvel album solo – Neil Halstead n’a pas pour autant rebranchées ses vieilles pédales d’effets aux détonations « catacyclismiques » sur Palindrome Hunches. Quatre ans après Oh ! Mighty Engine, son troisième album solo est un recueil de balades minimalistes dans la droite lignée de ses prédécesseurs. Sa persévérance a fini par payer, c’est aussi son effort solo le plus consistant à ce jour. Non pas que les bonnes chansons manquaient par le passé, mais Palindrome Hunches possède une tenue général qui lui faisait peut-être défaut jusqu’ici.
Neil Halstead a trouvé de nouveaux compagnons de route pour tracer sa folk contemplative : un backing band local déniché dans la ferme d’à côté, les rustiques Band of Hope – Ben Smith (violon), Drew Milloy (basse), Paul Whitty ( piano) et Tom Crook (guitare). A cela, ajoutons la présence de l’ami et producteur Nick Holton, déjà aux crédits de ses deux précédents opus solo. Au service d’une instrumentation noble et dépouillée, Palindrome Hunches distille une élégance faisant le point de jonction entre Nick Drake et Bert Jansch, minutieusement infusée d’Americana avec toujours ses superbes lap steel atmosphériques hérités de Mojave 3.
Il y a un aspect très casanier dans les chansons de Neil Halstead et c’est peut-être pour cela que l’on s’y sent si bien. La boiserie d’une guitare sèche et d’un piano comme conducteur principal d’émotion, les compositions prennent le temps de laisser respirer les silences (l’intimiste « Full Moon Rising » hanté par le fantôme du« River Man,», où la ressemblance vocale est troublante). Du traditionnel « Tied to You » serti d’arrangement délicats, jusqu’aux humeurs pop rêveuses de « Hey Daydreamer » et « Spin The Bottle » ou encore l’humeur pop aristo de « Bad Drugs and Minor Chords », ce songwriter britannique décidément très discret demeure l’un des meilleurs de sa génération. Pour ceux qui en doutent encore, il suffit d’écouter la première plage, l’intemporel « Digging Shelters », notre chuchoteur de rêve signe là une de ses folksong solitaire définitive, toute période confondue.
Terminons sur une note cocasse, l’album a en partie été enregistré chez son ami surfer et patron de label, Jack Johnson. Et oui, l’argent de ce Ben Harper pour midinettes sert à financer les albums de Neil Halstead… Un mal pour un bien, dirons-nous.