Il est relativement difficile de suivre la création en continue de Merzbow aka Masami Akita tellement ses productions abondent et se cumulent chaque année…


Il est relativement difficile de suivre la création en continue de Merzbow aka Masami Akita tellement ses productions abondent et se cumulent chaque année. Aussi lorsqu’en 2015 on s’arrête sur un de ses albums solos, on sait que l’on suspend volontairement le cours des choses, un peu comme un arrêt sur image. Cette image, en l’occurrence ici celle de Wildwood, n’est pas éloignée de celle à laquelle le musicien japonais a habitué ses auditeurs : de la fabrication bruitiste sans concession et coriace pour les oreilles naturellement, mais aussi un imaginaire bestiaire, univers marqué surtout par l’intérêt que porte Masami Akita à la cause animalière. Avec Wildwood, ce souci prend une valeur pratique, puisque l’on apprend que la vente des copies de l’album est directement destinée à la préservation de deux ours sauvages sauvés en Bulgarie.
Les quatre compositions qui constituent Wildwood se partagent inégalement la masse bruitiste en proposant des expériences divergentes. Kuma No Mori/Moon joue sur une distorsion de plus en plus intense avec un signal répétitif. Ce dernier oblige l’oreille de l’auditeur à ne pas se disperser grâce à son battement régulier, alors que le chaos qui se déchaîne la bouscule vers l’inconsistance et la désorganisation. Il s’agit d’une perte de repère qui n’aboutit pas ; on se trouve écartelé, divisé, tandis que les structures de Kuma No Mori/Night et Kuma No Mori/Winter sont plus frontales et denses ; cette division n’empêche pas le musicien japonais de jouer avec les différentes couches bruitistes superposées pour gagner en verticalité ou encore les resserrer afin de casser le mouvement linéaire. Kuma No Mori/Guitar qui achève l’album se situe dans une fréquence plus basse que le reste, du moins au début, pour laisser la place à une forme plus incisive et aiguë et se termine en blocs de pulsations irrégulières, comme pour suggérer l’arrêt momentané de cette belle machine infernale qu’est Merzbow.

Le site du parc sauvage Wildwood