Nouveau projet parallèle pour Jonathan Meiburg (Shearwater), un vaisseau post-rock atmosphérique, envoûtant et sensuel élaboré en plein désert texan.
Dénommer son album « Don’t shy away » – n’ayez pas peur- n’hésitez pas » en cette rentrée ne pouvait que nous encourager à écouter ce second album du groupe LOMA, qui a bien failli ne jamais voir le jour.
Loma est en effet un collectif texan qui réunit trois artistes très prolixes : Jonathan Meiburg (leader de Shearwater), Emily Cross (Snake Oil, Cross Record) et le musicien aux multiples talents et ingénieur du son Dan Duszynski. Après leur premier album éponyme, Loma, sorti en 2018 et une tournée remarquée, le trio n’avaient pas vocation à collaborer à nouveau ensemble, considérant cet opus comme un « achievement » probant et donc suffisant.
Mais un email recu par Emily Cross le 26 décembre 2018 va changer la donne.
Ce message très enthousiaste provient d’un ami qui l’informe que Brian Eno parle de son groupe à la radio BBC. Il fait l’éloge du titre « Black Willow » et de leur premier album, qu’il l’écoute en boucle. Après quelques mois d’intervalle (et les paroles encourageantes d’Eno), le trio change d’avis et se retrouve chez Dan Duszynski dans la campagne texane, où ils commencent à concevoir des chansons qui formeront Don’t Shy Away.
L’album qui en résulte vient fusionner de très belles influences spectral post-rock et des élans indie rock. Très envoûtant, il possède une légèreté qui dissimule des thèmes actuels de solitude, d’impermanence et de recherche de la lumière dans l’obscurité profonde.
Il a été enregistré en deux temps dans la même ferme isolée du Texas que le précédent. Un lieu où une série d’invités bien connus du groupe tels que Emily Lee (piano, violon), Matt Schuessler (basse), Jenn Wasner de Flock of Dimes/Wye Oak et une section de cuivres, a contribué à élaborer une ambiance sonore captivante.
Et puis il y a Brian Eno.
Loma l’a invité à participer au mantra « Homing », qui conclut l’album. Il n’a jamais parlé directement avec le groupe, mais son mixage complet est arrivé par e-mail tard un soir, sans prévenir. C’était tout ce qu’ils attendaient : minimal mais envoûtant, chaleureux mais énigmatique. Une fin parfaite pour un album qui parle de trouver un nouveau chez-soi dans un ancien foyer.
Ces apports ont certainement permis à cet album de posséder pour chaque titre cette écriture et cette délicatesse singulières, qui confèrent à cet album soigné, une richesse qui lui permet même après plusieurs écoutes, de ne jamais lasser.
Meiburg compare leur processus à l’utilisation d’une planche de Ouija (planche en bois pour le spiritisme sur laquelle est inscrit l’alphabet, les chiffres de 0 à 9 et les mots « Oui », « Non » et « Au revoir »). Il affirme que les chansons se sont révélées lentement, sur plusieurs mois. « Chacun de nous a une personnalité très forte, dit-il, mais à Loma, personne ne porte la couronne, donc nous devons nous faire confiance – et nous finissons dans des endroits où aucun de nous ne serait allé de lui-même. Je pense que nous voulions tous revivre cette expérience ».
Les paroles sont courtes, et le morceau est centré sur un mélange d’instruments à vent, comme les saxophones et les trompettes.
Au-delà des brumes de synthétiseur qui flottent, batterie sèche et piano délicat forment un tout cohérent et très séduisant.
On appréciera notamment cette guitare boisée rythmant un cor sur le titre très réussi « Octillo » ou les vents énigmatiques qui s’entremêlent avec une basse lourde et nostalgique sur « Thorn ».
Sur le plan sonore, on retrouve une construction quasi systématique avec une vague de calme et de tension qui monte et descend, changeant l’émotion de la chanson. Et alors que nous aurions pu nous attendre à être transporté dans une ambiance dépressive perdu sous un soleil de plomb en plein désert, l’écoute de ce nouvel album nous installe curieusement dans un imaginaire très urbain et surtout emplie d’une fraicheur régénérante et stimulante.
Le choix du titre « Ocotillo » qui est une plante gracieuse et filiforme qui fleurit de manière extravagante après la pluie – mais qui vit dans des endroits où il ne pleut pas pendant des mois, voire des années ne fait que souligner cette envie de véhiculer de l’apaisement et de l’espoir ou au moins de considérer ce choix comme une belle invitation à nous identifier à elle.
Voilà donc un nouvel album à écouter sans attendre pour cultiver (seul ou en collectif) notre résilience, même en milieu hostile et désertique !
Sortie le 23 octobre chez Sub Pop Records.
Déjà en écoute streaming via Sub Pop Megamart
Traking List :
- Fix My Gaze
- Ocotillo
- Half Silences
- Elliptical Days
- Given a Sign
- Thorn
- Breaking Waves
- Like a Stone
- Blue Rainbow
- Jenny
- Don’t Shy Away
- Homing