Un disque multi-genres très festif qui se dégustera de préférence au bord de la piscine, avec une piste de danse en option.


C’est marrant tout de même : il aura fallu un français, Manu Chao (voire la mano), pour enfin pousser les espagnols à concocter des cocktails exotiques de leur cru. En effet, après les catalans Dusminguet et leur mélange très digeste de cumbia, de son, de tex-mex, de rumba, de samba, de rock , de flamenco, de musique grecque ou gitane, et encore d’autres vallenatos et reggae (un pousse-café avec ça ou un Alka Seltzer?). L’adage « No llores, que la vida es un carnaval » (cesse de pleurer car la vie est un carnaval) des Dusminguet pourrait aussi bien coller à Amparo Mercedes Sanchez Perez, l’andalouse qui suit à la trace ses compatriotes catalans depuis qu’elle a quitté le barrio Lavapies de Madrid pour la ville côtière à la mode. Les Dusminguet sont d’ailleurs venus lui prêter main forte sur la ballade flamenco « Ven », enregistrée pour l’occasion à El Garraf, dans les montagnes qui séparent Sitges de Barcelone…

Ce disque, cinquième déjà, distille différents courants mais principalement – voire exclusivement – issus du continent américain (pas de détail, les trois). Ce n’est pas un hasard, car le pedigree de l’espagnole, venue de la belle Greneda, comprend des aller-retours là-bas, et des rencontres qui expliquent tout ceci. Comme un étudiant en généalogie, on en arrive très vite à faire des liens entre tous ces gens, et d’autres encore. Des exemples? Sachez que Manu Chao ou Fermin Munguruza ont travaillé avec elle, ainsi qu’un des membres fondateurs de Dusminguet, sachez également qu’ils habitent tous à Barcelone et n’ont pas moins la même philosophie : la fiesta. Sans pour autant oublier un autre principe qui importe et se perd : la solidarité. Par exemple alors que – je cite – « tot apunta al desastre mundial ». Tout le prouve : son nom, la pochette, les paroles, l’ulisation du chant espagnol-anglais-français… En résumé, ils tentent tous d’appliquer la méthode Bob Marley en Europe. Par les temps qui courent, on aimerait que l’Europe soit plus ouverte et plus colorée…

Du coup, le rapprochement avec Calexico coule de source, elle à qui il lui est arrivé de couvrir la tournée européenne, en première partie, et dont un titre a été repris par la paire Burns-Convertino. On ne s’en offusquera pas, car il y a souvent ici un côté mariachi des plus alléchants qui rappelle le duo de Tucson/Arizona.

Ceci dit, ce disque comporte beaucoup de perles et quelques casseroles. Débarrassons-nous d’abord de ces dernières : la reprise de « Redemption song » du grand Bob n’est pas des plus réussies (euphémisme), et aurait mieux fait de prendre la poussière dans un studio perdu de Catalogne. Il manque aussi, par rapport aux autres groupes modèles, un petit côté punk-rock qui donnerait à l’ensemble une couleur un peu moins gentillette, à même de donner bonne conscience au bobo qui roule en 4/4 de marque.

Dans les perles, nombreuses précisons-le, il y a le très bon « Tiempo pa mi », chanson à trois sauces (rumba, salsa, son) qui se dégustent avec un plaisir non simulé. Le très reggae stylin « Me voy lejos » semble faire écho à « Hoy me voy » du Sergent Garcia, avec un solo de cuivres digne de la croisière s’amuse rentrant à vitesse grand « V » prime dans la collection « les musiques honteuses que j’aime ». Comme la troupe Dusminguet, le chant se fait aussi parfois en catalan (« Somnis ») ce qui ajoute, en sus du violon gipsy, une épice supplémentaire. Enfin, pour boucler la boucle, « Jungle » amène un côté hip-hop et raggamuffin à se pourlécher les babines, et à remplir le carton « los discos para la fiesta », qui traîne dans la cave, à côté de la piscine gonflable et du barbecue…

– Le site d’Amparanoïa