Hystérique, enfantin, caressant, foisonnant, fourre-tout, fouillis, fada… La canadienne Merril Garbus mélange un peu de tout ça dans sa grande marmite lo-fi : du lo-fi pas cache-misère, du fourre-tout pas feignant ni fadasse par une gentille sorcière un peu cinglée mais drôlement douée.
De la dite Merril, on ne sait pas grand-chose si ce n’est qu’elle aime bien se faire des genres de peintures de guerre pour chanter, qu’elle a l’air un peu barrée et qu’elle est armée d’un gros ukulélé (ou alors qu’elle est vraiment très petite). On peut juste supposer, après avoir écouté son album, qu’elle préfère probablement à celle des adultes la compagnie des enfants qui, à coup sûr, doivent bien le lui rendre. On l’imagine bien en baby sitter préférée des enfants pas sages : avec elle au moins, on a le droit de se salir.
Ce qui se remarque assez vite à l’écoute de Bird Brains, c’est le contraste entre un contexte lo-fi/bordélique et la maîtrise dont fait preuve la musicienne. Maîtrise dans la composition tout d’abord : on sent, malgré le caractère hétéroclite des inspirations (pop, folk, musiques africaines, rock, funk, hip hop…), une vraie facilité à construire avec trois fois rien des chansons véritablement abouties. On pourrait par exemple citer le rock froid et tranchant de « Sunlight », le funky « Jumping Jack », ou encore la pop à la fois exubérante et mélancolique de « Lions » ou « Fiya » (peut-être le bijou de l’album) — on avouera de notre côté un faible pour la chorale de micronésiens qui introduit « Safety ». Alors bien sûr, parfois ça part quand même un peu dans le décor et on aimerait que quelqu’un soit là pour taper sur l’épaule de Merril et lui dire de se calmer, comme sur les (quelque peu) fatigants « Hatari » (sorte de chant africain hystérique) ou « Jamaican » (genre de hip hop claustrophobe hystérique). Pour ne rien gâcher, on ajoutera que la demoiselle est aussi une sacrée musicienne. Ainsi, d’une chanson à l’autre, elle chante, gueule, éructe, murmure, rape avec une égale maîtrise, déraille parfois mais retombe toujours sur ses papates, papates qui lui servent également à transcender complètement le côté anecdotique du ukulélé pour en faire un véritable instrument dont elle tire des arpèges étonnamment riches, toujours avec ce sens du rythme juste, qualité parfois négligée mais aussi nécessaire à la pop qu’une bonne mélodie.
On l’aura compris, Merril Garbus est un vrai talent, bien brut de décoffrage, mal peigné (pas peigné du tout en fait), mal fagoté, mal embouché, etc. Un peu ado mal dans ses Converses et un peu gamine folle furieuse mais en tout cas fermement décidée à ne pas grandir.
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