Nouveau poulain de l’écurie Saddle Creek, Rilo Kiley fait parti de ces groupes qui investissent notre quotidien sans crier gare pour ne plus s’y déloger et nous achèvent à grands coups de pop songs mélancoliques.


Il est assez étonnant de constater le nombre actuel de groupes américains géniaux émergeant d’un bled perdu. Avec leur allure de parfait antihéro qui contraste avec des Interpol et autres Strokes. L’activité principale de ses nouvelles formations consistent à brancher leurs guitares, cloîtrées dans leur garage au fond du jardin. Sans véritable rattachement à une scène locale, des groupes comme Grandaddy, Lift To Experience, Sparklehorse voir Wilco parviennent à transformer la morosité ambiante de leur quotidien en de bouleversantes chansons.

Parmi cette nouvelle génération de songwriters atypiques, le label Saddle Creek se distingue. Conor Orbest, en chef d’entreprises et très précoce maître d’oeuvre de Bright Eyes, a d’ailleurs la réputation de vivre lui et les siens à la manière de mormons, bien loin de l’oppression de la ville et sous des codes d’éthique bien précis.

Implanté à Omaha, petite bourgade du Nebraska, la minuscule structure dispose d’un vivier impressionnant de formations de cet acabit : Bright Eyes, Cursive, The faint, Azure Ray… tel des taupes effrayées par la lumière, tous ces artistes possèdent une vision « isolée » de ce que doit être un groupe de rock.

Rilo Kiley fait figure pourtant d’exception au sein de Saddle Creek : signé l’année dernière, ce quatuor est basé à Los Angeles. Leur musique n’en possède pas moin beaucoup d’affinités avec ces groupes « reclus ». Existant à l’origine sous forme de duo, Jenny Lewis et Blake Sennet se rebaptisent Riko Kiley en 1998 avec l’arrivé du batteur Dave Rock et du bassiste Pierre de Reeder. Renforcé par l’arrivé de ses deux musiciens, leur folk mélancolique devient plus ambitieux et nettement plus pop. Après quelques EP auto-produits, 2001 est l’année de la reconnaissance : le label de Seattle Barsuk (dirigé par les membres de Death Cab For Cutie) distribue leur premier album Take Offs and Landing, vendu jusqu’alors sans le moindre soutien de label.

L’arrivé d’un nouveau batteur en la personne de Jason Boesel et quelques concerts en compagnie des Breeders, Pedro The Lion et Superchunk leur permet de tester de nouveaux titres et d’étendre leur audience. Inconnu en Europe, The execution of all Things va permettre de nous familiariser avec ce combo passionnant.

The execution of all Things est une pure merveille, un recueil intime de popsongs dont on a bien du mal à se défaire. Epaulé en studios par Mike Mogis (producteur attitré de Saddle Creek, remarqué pour son travail chez Brights Eyes et Cursive), Riko Kiley est parvenu à gravir un nouveau palier et obtenir un son à la hauteur de ses ambitions. Augmenté de divers amis musiciens venus enrichir la palette sonore du groupe (vibraphone, cloches d’orchestre, cello…), une musique à mi-chemin entre les Delgados et Drugstore. Le joli brin de voix de Jenny Lewis facilite le lien avec ces groupes.

Impliqué dans un format pop où les grands refrains ont la part belle, Riko Kiley est assez futé pour nous berner à chaque nouvelle écoute et ne jamais être redondant. Petit détail tout de même : ce combo possède un spleen peu commun dans ce genre de formation, accentué par des textes rappellant Bright Eyes, leur fameux voisin de label. De très belles paroles, à la fois dures et denses, qui tournent autour de la notion de surplace et des relations personnelles.


« Sometimes in the morning I am petrified and can’t move awake
but cannot open my eyes and the weight is crushing down on my lungs
I know I can’t breathe and hope someone will help me this time »


A better Son/Daughter

Il est d’ailleurs étonnant d’écouter ce contraste entre des textes assez dures et ses mélodies gentillettes, limite « spectorienne ». Plus mélodique que Bright Eyes mais pas moins possédé, The execution of all Things est un album incontournable pour tout amateur de « Sad song ».

-Le site officiel de Rilo Kiley

-Le site de Saddle Creek