En 2000, Fennesz avait déjà fait ouvertement référence à Brian Wilson en reprenant « Don’t talk (put your head on my shoulder) » sur Plays, un ep ou l’on retrouvait également une cover des Rolling Stone. Une version qui n’avait en commun avec l’original que son titre. Musicalement, impossible d’entendre une bribe de la chanson de Pet Sounds, mais au-delà, on pouvait y sentir la quintessence même. C’était la préface d’une oeuvre à venir.

Avec un titre comme Endless Summer, les amateurs de Fennez se doutaient bien que son nouvel lp serait plus lumineux que les précédents. Ses travaux électro-acoustiques à la lisière de l’expérimental pur et de l’ambiant y sont ici sublimés, et le mot n’est pas trop fort. Difficile en fait d’imaginer un album d’idm aussi charnel et vivant que celui-ci. Rien n’y est commun et déjà entendu comme tout bon disque expérimental, et pourtant l’impression majeure qui s’en dégage, c’est une nostalgie et une mélancolie douce, une berceuse qui vous caresse dans le bon sens du poil.

Malgré ça, Fennezs ne fait aucune concession à ses sonorités habituelles. Les mélodies sont triturées et éclatées littéralement en fragments, elles semblent s’effriter continuellement et se recomposer sans effort, suivant le fil de textures vibrantes et d’un traitement sonore des instruments jamais entendu sur aucun autre disque avant. Le morceau-titre de l’album en est l’exemple parfait, et la mise en avant d’un son de six-cordes explose ici comme une vague de bonheur avant de repartir graduellement et de se perdre joliment dans les méandres éléctroniques.

Sur  » A year in a minute », Fennesz retrouve les drones noisy qui parcouraient « Plus Forty Seven Degrees », son précédant opus. Et même ainsi, on sent cette chaleur, cette subtilité fragile recouvrir la tonalité bruitiste du morceau. Ce bruit a le son d’un ressac, quasiment hypnotique. Les arrangements sont fins et doux comme du sable blanc tout au long de l’album, et même les plus réticents à l’éléctronica répétitive et stagnante pourraient y trouver ici leur meilleure porte d’entrée dans ce monde.

Difficile de croire qu’une musique aussi exigeante que celle-ci puisse en même temps suggérer un abandon et un plaisir si évident. C’est la tout l’exploit et la qualité d’Endless Summer. Oui, Fennesz fait honneur au Beach Boys. Il a su capter cette lumière et cette légereté avant de la broyer dans ses machines et d’en extraire une pâte sonore hors du commun. Ecouter ce disque, c’est s’allonger sur une plage et sentir son corps parcouru de doux et chauds cliquetis analogiques. On ne peut que fermer les yeux et ouvrir les oreilles allongé sur une plage de toutes façons.