Le second album solo de l’autre moitié des Moldy Peaches surprend son monde en délivrant une collection de ballades de facture très pop, accompagné d’un ensemble à cordes tourbillonnant. Délicieusement bancal et raffiné.


Pour son grand retour discographique, notre ami Adam Green (car Adam est l’ami de tous) se laisse aller en nous exposant une coupe de cheveux plus touffue qu’auparavant et qui a tendance à accentuer son allure de jeune looser tout droit sorti du film Kids. Penser d’ailleurs un jour à lui demander pourquoi il s’affiche pratiquement toujours avec le même cliché sur ses pochettes – ce nouveau portrait était déjà présente sur la couverture de son dernier fanzine qu’il édite et distribue uniquement à New York.

Mine de rien, nous avons affaire ici à un drôle de bonhomme. Lorsque notre jeune New Yorkais de 22 ans n’est pas occupé à jouer les Robin Hood costumés au sein des Moldy Peaches, il vaque à d’autres occupations artistiquement lucratives comme bricoler son fanzine de 7 pages avec les moyens du bord, écrire quelques chansons avec son copain Ben Kweller (les deux possèdent une bouille étonnement similaire) ou partir tout seul faire des tournées marathons à travers le Japon, l’Europe et sa patrie d’origine. Le tout sans le moindre soutien promotionnel. Bref, on ne peut pas dire qu’Adam s’endort sur ces lauriers : Avec un style pareil, les appparences sont souvent trompeuses.

Pour décrire l’univers du trublion, je me contenterais de retranscrire les propos d’un internaute sur amazon.com qui définissait le premier album des Moldy Peaches par la formule : « Tellement mauvais que c’est bon ». Et pour cause, les premières chansons du groupe étaient enregistrées sur un dictaphone (on n’ose employer le terme 4 pistes au vu du résultat). Et puisque l’on est dans le créneau citation, j’en rajouterais une autre d’Edith Piaf qui a dit un jour : « pour devenir un artiste c’est simple, il faut mettre en avant tes défauts ». On peut dire qu’Adam Green a fait de cette formule son chemin de croix!

Le succès des Moldy Peaches repose donc sur le charme d’une musique très approximative, mais armé de compositions solides. Lorsque son parrain musical Daniel Jonhston revendique son illettrisme musical, Adam Green, lui, est un véritable érudit qui reprend « Eating Noddemix » des Young Marble Giants sur la compile de son label Rough Trade, sans compter le nombre de reprises FUNement hétéroclites qui pullulent sur le dernier double album des Moldy Peaches (Spin Doctors, Four Seasons, Grateful Dead…). Ce côté amateur/foutage de gueule qui découle de ses chansons, Adam Green aspire à cette ringardise.

Garfield, premier album solo paru l’année dernière, prolongeait l’esprit des MP, mais restait inférieur par son manque d’audace. A l’inverse, son successeur Friends of mine est tellement bon qu’il peut prétendre au titre de véritable premier album. Fini le temps où circulait les cassettes pourraves repiquées ensuite sur cd. Adam Green a dorénavant des objectifs bien plus grands. Enrobé d’une production plus accessible pour le commun des mortels, les quinze chansons délivrées sur ici sont toutes agrémentées d’un orchestre à cordes. Plutôt culotté de la part d’un ex empereur Lo-fi! Le plus surprenant dans tout ça, c’est que le monsieur a réussit avec succès sa reconversion de crooner en conservant la face ludique des Moldy Peaches.

Les progrès sont constants sur tous les plans. Le nombre de chansons potables est à la hausse : ses berceuses acoustiques accrochent l’auditeur avec une aisance déconcertante. Difficile de ne pas siffloter le refrain de « Jessica » (hommage à la femme d’Homer Simpson), mini tube en puissance. Si la voix de Green a également mûrie, – forcément le gars avait 19 ans du début des Peaches – elle ferait toujours passer Stephen Malkmus pour Bono. Le modèle de Jonathan Richman pour cette maladresse intentionnelle y fait toujours écho.

Les paroles par contre, sont toujours aussi abstraites, passant d’une niaiserie époustouflante (« Bluebird » et « Friends Of mine ») à des sujets plus destructeurs comme « I Wanna Die », qui concourt avec le titre le plus glauque depuis « I Hate Myself and I want to Die » de Cobain. Mais vous l’aurez compris, on aime se laisser entourlouper par ce petit prodige.

Non content d’être le chef de file du mouvement antifolk avec sa bunny girl Kimya Dawson, Adam Green vient de s’autoproclamer grand crooner brico-rigolot. Un trône qui lui convient à ravir. Adam Green nouveau Beck? Derrière cette comparaison, il n’y qu’un pas à franchir.

– Le site d’Adam Green