Troisième album du quartet post rock d’Austin, riche en envolées instrumentales propices au vague à l’âme automnale. Les contrées arides du Texas semblent toujours autant porteuses de tourments inconsolables.


On a beau dire et passer outre certaines caricatures, lorsque l’imagerie mystique est utilisée avec bon escient et talent, cela donne certaines des meilleurs pages du rock (ref : Jeff Buckley, Nick Cave voire même Richard Thompson, Leonard Cohen). A contrario, l’effet inverse est aussi de rigueur (Muse, Muse, et Muse…).
Evoluant dans les même sphères, il est intéressant de remarquer à quel point ces nouveaux groupes de rock originaire du Texas (Explosions in the sky donc, Lift to experience, And you will know us by the trail of dead, The Polyphonic Spree…) usent de cette image ecclésiastique, et par ce biais, semblent détenteur d’une énergie épique assez époustouflante.

En 2001, la parution du second album des texans d’Explosions in the sky fit l’effet d’une bombe. Sorti une semaine avant la traumatisante attaque du World Trade Center, la pochette de Those Who Tell The Truth Shall Die, Those Who Tell The Truth Shall Live Forever (hargh, je reprends mon souffle!) montre un avion en perdition guidé par un ange et sa lumière divine.
En ces temps obscures, vous imaginez que l’objet prenait malgré lui des allures prophétiques de mauvais goût.
Je dois avouer que pour ma part l’intrigante pochette procurait son effet, si bien que j’avais un peu l’impression d’avoir entre les mains la maudite cassette vidéo du film The Ring. Mais sitôt le CD posé sur la platine, l’aspect superstitieux s’estompait pour faire place à une révérence accrue.

Those Who Tell The Truth… reste une oeuvre d’une gravité phénoménale et d’une tristesse difficilement surpassable. Dans ce disque, l’expressionnisme rock de Mogwai rencontrait la folie épique de GYBE?. Sans conteste un des meilleurs albums rock d’une année pourtant riche en bien belles choses (allez au pif : Idaho, Lift to Experience, Strokes, Black rebel motorcycle Club, The Shins et j’en oublie…).

Ce nouvel album était donc attendu comme le retour du messie par les amateurs de musique post-rock. Et malgré cette attente qui pousse l’amateur que je suis à être forcément déçu, The earth is not a cold dead place tient ses promesses.

Aves son titre en trompe l’oeil, l’ambiance n’est pourtant toujours pas aux Beach boys. Produit cette fois par John Congleton (Clogh, The paperchase), la formule basique du quatuor basse-guitare-batterie prend une nouvelle tournure : les guitares explorent des horizons beaucoup plus calme, mais pas moins possédés. La rage et la distorsion ont fait place à une résignation mêlée de mélancolie.

Enregistré en juin dernier, les cinq titres jetés ici en pâture côtoient du nouveau matériel et quelques chansons remaniées, datant du premier album tiré à 300 exemplaires, depuis objet de collection (le groupe l’a d’ailleurs récemment réédité pour vendre durant ses concerts). Pas un seul morceau ne passe en dessous de la barre des 8 minutes, ce qui nous gratifie de quelques morceaux de bravoure dont l’intensité n’a d’égal que leur beauté.

The earth is not a cold dead place demeure aussi impressionnant par sa densité. Devant un tel spleen, on peut se demander où le quartet d’Austin va chercher cette mélancolie guère rassasiée. Chaques membres doivent être atteint d’une maladie incurable où je ne sais quoi pour aboutir à une telle gravité (ce que je ne leur souhaite pas évidemment, moi je ne veux que leur bonheur, peace). Ames sensibles et autres amateurs de sensations fortes, sortez les Kleenex, vous allez en avoir pour votre compte.

Il est étonnant de voir à quel point la symbiose dans ce groupe est parfaite : les instruments font bloc dans un espace compact, dont l’aboutissement consiste à pousser les mélodies vers leurs retranchements. « Memorial », un des sommets de l’album, exploite ce crescendo assez diabolique.

Autre pièce de choix, « The Only moment we were Alone » s’étend sur près de dix minutes, alternant passage claire et final apocalyptique digne de Mogwai, mais en plus élaboré.
La musique des Explosions in the sky possède assez de similarité avec celle des ecossais, mais je penche personnellement pour les texans qui possèdent un goût plus prononcé pour la recherche mélodique et épique.
Leur musique plus aboutit connait avec une vrai logique de développement, ce qui fait un peu défaut à la musique de Mogwai trop répétitive à mon goût.

On espère qu’un hypothétique succès ouvrira quelques portes à des groupes discrets comme Paik, The Mercury Program ou Maserati, autres mastodontes du genre, qui prouvent que le post-rock n’est pas seulement affaire d’ennui et peu se révéler passionnant d’un bout à l’autre d’un disque.

Achetez ce disque ou volez le, mais vous ne le regretterez pas.

-Le site des Explosions in the sky

-Le site de Temporaryresidence (Label US du groupe)