C’est l’histoire de deux finlandais qui ont carte blanche pour inventer une musique qui plaiera à tous. Variée, délurée, délirante, positive, marrante, dansante…


A voir les dernières chroniques que j’ai fait, la tentation de penser que c’est du nord de l’Europe que le vent souffle en matière d’innovation dans le merveilleux monde de la musique dite alternative est grande. Entre les saxons, très prolifiques ces derniers temps (mais ne l’ont-ils pas toujours été ?) et les vikings, on hésite à dire qui des deux a le plus contribué à l’histoire du rock alternatif. Une chose est plus sûre : les gaulois et les pays latins sont un peu à la traîne en la matière ces derniers temps. Pas que ces derniers temps dites-vous ?…

Certains invoqueront la langue, d’autres l’ouverture d’esprit (forcée rétorqueront les coqs, sûrs de la supériorité hypothétique de la culture latine). Enfin, les derniers, diront qu’ils n’ont que faire de ces querelles de bas étage n’intéressant in fine que les nationalistes arriérés.

Tout ceci pour vous dire que nous avons à faire à des finlandais, comme leur nom ne l’indique guère. James Spectrum et Ja Jazz ont formé Pepe Deluxé à l’origine sous forme de trio, avec Dj Slow, en 1997. Ils ont eu la chance de voir leur titre « Women in Blue », comportant des samples de Nina Simone et Tony Hatch illustrer la campagne télévisée de Levi’s en 1999. Et puis l’argent ne fait pas le bonheur mais y contribue fortement et c’est ainsi que nos finlandais ont pu laisser tomber leur boulot et se consacrer coeurs et âmes à leur nouvelle carrière. La notoriété leur a aussi ouvert pas mal de portes, et permis de garder une authentique intégrité artistique, ce qui est assez rare pour être noté.

BEATitude constitue donc le résultat de ce que Pepe Deluxé aime et veut faire, sans concessions et surtout sans barrières. Et ça se sent. A l’image délirante de la pochette. On ne sait pas vraiment comment aborder l’album tant les styles se croisent, d’une chanson sur l’autre, dénotant autant une véritable ouverture d’esprit qu’un don pour la chose musicale, que ce soit pour danser, pour se délasser ou pour se souvenir. Ne vous étonnez point d’y entendre tantôt des violons, tantôt des cuivres, le tout parsemé de samples divers, de scratches et d’électronique expérimentale.

Les titres dance et trip-hop – la spécialité du duo – ne sont pas légion mais presque. Les influences semblent nombreuses et diverses, mais on pense de prime abord à The Wiseguys et leurs morceaux délurés, voire aux Propellerheads. Mais aussi, sur des titres plus doux, à Morcheeba et son sens de la mélodie facile, et St Etienne est à l’honneur dans « First Goodbye ». Enfin, les riffs de guitare sur « Salami Fever » (les fameux Wah-Wah) qu’ont déjà empruntés les Beastie Boys dans leur jam sessions sont toujours aussi efficaces, ainsi que les scratches.

Des titres plus rock lorgnent ici et là BEATitude. « Real Simple » va voir du côté de Beck, et du côté de Mike Patton version Mr Bungle tellement la voix y est teintée d’un humour sarcastique de crooner jenfoutiste. « Ask for a Kiss » rend hommage aux voix du grand jazz des années 40, et « Girl » aux grandes voix de la soul.

Enfin, un esprit de ‘positive globalisation’ nous fait voyager d’un continent à l’autre. D’abord avec « Indifférence », chantée en français, où la pop mélodieuse d’un Stereolab est privilégiée. Ensuite, « Numa » et ses sons arabisants et pakistanais ne manque pas de piquant. Enfin, « Vamos Muchachos » est un clin d’oeil kitchos et révolutionnaire aux pays latins, et voilà qu’on pense à nouveau au fou furieux qu’est Mike Patton, allez savoir pourquoi … C’est festif à souhait. Et ça fait du bien.

-Le site de Pepe Deluxé