Les disques de BJM sont un vrai cauchemar pour tout rock-critic : un véritable capharnaüm du rock où le seul maître-mot consiste à décortiquer les compositions des maîtres et revisiter quelques thèmes célèbres pour au final mieux brouiller les pistes.


Avec un titre et une typo rendant directement hommage aux Beach Boys, The Brian Jonestown Massacre n’a pas peur de s’attirer les foudres de Sean O’Hagan, maître d’oeuvres des High Lamas et descendant officiellement reconnu de la lignée Wilson. Mais à vrai dire, ce groupe à géométrie variable (une quarantaine de musiciens au bas mot y ont circulé depuis le milieu des 90’s) ne joue pas à ce petit jeu et préfère nettement nous perdre dans un brouillard musical profond. Car à la différence des High Lamas, The Brian Jonestown Massacre ne se contente pas de plagier un seul groupe (en l’occurrence les Beach Boys), mais pratiquement tout ce qui bouge dans le domaine des légendes de la pop moderne. En voici pêle-mêle quelques-uns répertoriés: Ennio Morricone, Pink Floyd, Van Dyke Parks, Echo & Bunnymen, My Bloody Valentine, Ride, REM, Byrds, Rolling Stones, Zombies, Left Banke et j’en passe.

Articulé autour du chanteur et principal compositeur Anton Newcombe, The Brian Jonestown Massacre possède une certaine habilité à plagier les manières des piliers de la pop moderne. Son imposante discographie qui s’étire depuis près de dix ans -déjà huit albums à leurs actifs – en atteste. Avec un savoir-faire pareil en matière de plagiat, il n’est pas étonnant d’ailleurs que Newcombe loue ses services à quelques pointures comme les Dandy Warhols ou The Tyde.

Obligatoirement, à force de trop picorer à droite à gauche, ce genre d’ovnis extra-musical souffre d’un manque certain de sensibilité et d’âme qui pourrait transformer cette formidable photocopieuse en formation de premier plan. Pour palier à ce fameux manque d’étincelle, il semble bien que ce huitième album amorce les changements tant attendus. Le profond sentiment qui se dégage sur cet imposant recueil de 15 titres, c’est qu’après avoir maîtrisé sur le bout des doigts toutes les recettes studios pour sonner comme ses modèles, la tribu de San Fransisco semble vouloir se concentrer davantage sur l’ossature mélodique.

Bon… pris de plein fouet, And this is our music a toujours de quoi désarçonner. On ne sait pas trop où donner de la tête devant une telle masse sonore – si ce n’est encore une fois – s’amuser à accoler à côté du tracklisting le nom des dizaines de noms qui nous viennent à l’esprit. Mais en grattant de plus près, force est d’admettre que le substantiel prend le pas sur les effets de styles, comme en témoignent quelques surprises disséminées ça et là.

On se dit que si l’ensemble de l’album pouvait atteindre la magnificence de « When Jockers Attack », nul doute que Shack aurait du mouron à se faire. Mais voilà qu’impossible à tenir sur une chaise, le groupe nous assène à la plage suivante un radical « Prozac us Héroin » , parfait virage New Wave dans l’esprit d’Echo & the Bunnymen. Et ce petit détail résume toute l’histoire du Brian Jonestown Massacre : une bande de copains plus douée que la moyenne pour plagier ses héros, mais peu capable de s’en tenir à une ligne de conduite jusqu’au bout.
Mais il ne faut pas faire la fine bouche non plus, car malgré son aspect touffu aux premiers abords, cette diversité d’ambiances vaut le détour. On est un peu comme un enfant cherchant, un lundi de Pâques, les oeufs au beau milieu du parc du Luxembourg. C’est un véritable bonheur que de découvrir ces mélodies à la fois douces et mystérieuses si bien accompagnées d’arrangements luxurieux.

Réputé plus rock dès qu’ils se présentent à un public (ils tournent en ce moment avec Guided by Voices sur le continent US), on imagine facilement que cette fanfare doit avoir une sacrée allure sur scène. Une hypothèse qu’on aimerait bien vérifier si ce groupe daigne un jour fouler notre patelin. En attendant, on se dit que le titre du disque résume bien l’état d’esprit de cette galette : « voici notre musique… », c’est à prendre ou à laisser. Et franchement, il serait dommage de laisser traîner un si bel objet.

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