Les espoirs 2001 du label Hefty records nous reviennent avec un album ambitieux, souffrant malgré tout du syndrome de la « vision des grandeurs ». A vouloir aller un peu trop loin, la paire de Chicago a un peu perdu de son âme. A vous de juger.


Une sensation de parasol planté sur du sable chaud, des rayons de soleil qui traversent une mer d’huile d’un bleu turquoise : pas de doute, Telefon Tel Aviv is back! Très attendu par les aficionados d’une electronica solaire, le duo ricain Joshua Eustis et Charles Cooper (Telefon Tel Aviv en raccourci), se devaient de pousser le bouchon encore plus loin depuis l’accueil de Fareinheit Fair Enough, sorti en 2001. Sorti sur le très respecté label de Chicago Hefty Records (Prefuse 73, Savath & Savalas…), ce premier album avait connu des échos dithyrambiques de la part des amateurs de sensations electros léchées et reposantes. Protégés du baron-indu Trent Reznor (!!), les Telefon Tel Aviv (curieux nom tout de même) s’imposaient comme des valeurs sûres aux côtés de références comme Four Tet et les anglais de Fridge.

Toujours étalé sur neuf titres (pas un de plus, pas un de moins), Map of What Is Effortless se veut donc plus Wharolien. Les choses démarrent plutôt bien avec « When It Happens It Moves All By Itself », morceau idyllique, savant mélange de Air pour ses ambiances symphoniques et Four Tet pour ce brassage d’electronica chaleureuse et inspirée. Et puis tout d’un coup, vlan!
La porte nous claque au nez. Une voix se pose sur le traître « I lied » (au titre prémonitoire) et on commence à piger le truc : comme beaucoup d’artistes electro, TTA a cédé à l’appel du chant, non sans concessions. Le duo a recruté la voix très soul de Damon Aaron (I-Wolf, Level, T-Love, Adam Rudolph) sur quasiment tous les morceaux, épaulée ci et là par Linsday Anderson (l’une des voix de L’Altra).

On sombre vite vers la facilité, l’apport du chant ne faisant encore une fois qu’accentuer l’aspect commercial de la démarche. Ce qui fâche un peu sur cet album, c’est qu’on a parfois l’impression d’écouter du Craig Armstrong bis. « Map of what is effortless » pourrait sortir tout droit de l’esprit symphonique de l’arrangeur de Bjork et Madonna : très joli, mais tout cela sent un peu la redite et révèle un intéret très limité. Parfois, on frise même le ridicule sur « My Week Beats Your Year » où l’usage martelé de vocoder (il faut rayer cet instrument de la surface de la terre) et d’ambiance urbano-lounge ne riment à rien. Ce qui agace le plus, c’est que contrairement à son magistral prédécesseur, la paire de Chicago semble s’être embarquée indéniablement vers une voie de garage.

J’ai peut-être tendance à m’emporter, le résultat reste dans l’ensemble agréable – après tout, ceux qui ne connaissent pas le groupe ne se sentiront pas baffoués – et certains titres instrumentaux rappellent Bent (qui se sont au passage également méchamment vautrés sur leur second album). Sur « What It Is Without The Hand That Wields It », on perçoit même cette étincelle qui nous avait tant charmé, mais la flamme reste éphèmere. Les frasques mystérieuses et ambient du premier album ont pour le coup perdu de leur charme.

A force de vouloir travailler avec un peu tout le monde (L’Altra et Pulse Programming pour le meilleur, A perfect Circle et Eminem pour le discutable), leurs aspirations se retrouvent coincées le cul entre deux chaises : comment faire du sang neuf sans pour autant tomber dans le mercantile? Là est le dilemme. Du coup, malgré cette ambition affichée de franchir un nouveau palier, Telefon Tel Aviv se retrouve paradoxalement coincé. C’est ce qu’on appelle se retrouver piégé à son propre piège. Dommage.

-Le site officiel de Telefon Tel Aviv

-Le site d’Hefty Records