Burd Early, un jeune barbu déchu qui se pose mille et une questions nous livre un album-testament qui sent la mélancolie mais qui n’a pas oublié pour autant la beauté musicale.


Sous le pseudo de Burd Early, James Angelos nous livre son troisième album Mind and Mother. Ce songwriter américain, originaire de Brooklyn s’est fait connaître pour avoir joué avec des groupes comme Songs:Ohia, Anomoanon, ou Cass McCombs. Pour la dernière édition du festival de Sundance, notre intéressé s’est entiché de la bande son du court métrage nommé Are you feeling lonely dont une large assemblée resta sans voix par la délicatesse des compositions. Ainsi, Burd Early est à rapprocher de ces artistes qui emmènent le folk sur des rives où la mélancolie de l’âme se mélange au désir charnel. Mind and Mother est à placer dans sa discothèque aux côtés du Ocean Beach de Red House Painters, du Red Apples Fall de Smog ou encore du Natural Bridge de Silver Jews.

Dès le titre d’ouverture d’ailleurs, « How far », on sait, on sent, on devine que cet homme-là y a mis tout ce qu’il avait dans le ventre…et dans le coeur. Mais la déprime, le questionnement perpétuel du quoi, du pourquoi, du comment sur le questionnement lui-même est ici à son paroxysme : (« I’ll stay up late tonight, how will I sleep tonight? When questions, they go unasked »). Le type est dans une réflexion poussée… Se poser des questions sur les questions, en voilà une question qui, c’est vrai, méritait toute son attention.

Accompagné par des instruments facilitant l’heuristique chère à Socrate, Burd Early semble se lamenter tout le long. « Blackdot » ressemble à s’y méprendre à du Palace (c’est vous dire la gaieté des propos et du ton utilisés). Les tempo sont lents, les mélodies assez tristounettes mais néanmoins jolies et touchantes. Le tout est enregistré à la manière de la série unplugged, à savoir de manière acoustique, mais sans pour autant mettre la batterie au placard.

Officiant depuis 1999, Burd Early s’y connaît en mélodies larmoyantes et en déceptions existentielles. Seulement voilà, grâce à une certaine lassitude peut-être, induite par ses précédents albums, ou peut-être aussi prévenant un enfermement psychiatrique pour dépression aiguë chronique, notre ami arrive à mettre ici ou là des notes un chouia plus gaies (enfin, vous attendez pas à une fête foraine pour autant…). La formidable voix de Rosario Garcia-Montero sur « Undoing the Day » apporte un petit sourire dans ce cimetière certes joli, mais tout de même assez ténébreux et mélancolique. On pense même à Howe Gelb tiens.

Parfois chuchotées, les paroles sont assez révélatrices de l’état d’esprit de son auteur. La pedal steel (« Blackdot ») vient parfois saupoudrer le tout avec un peu de rock, même s’il est folkeux, afin peut-être qu’on n’oublie guère que l’on est dans le songwrtiting peut-être, mais que ce dernier n’empêche point les musiciens de s’exprimer. A ce propos, « Gale regale » est un instrumental intimiste et lancinant qui rejoint quelque peu le mystère qui émane de la pochette.

C’est le genre de disque « idéal » pour un chagrin d’amour. Enfin, non, pas un chagrin d’amour non, à moins que vous teniez à ce que l’auteur de cet article se retrouve en prison pour incitation au suicide. Non, plus sérieusement, ce disque est très beau mais très noir aussi, et n’est donc pas à mettre entre les oreilles de n’importe qui…

A déconseiller fortement à ceux qui sortent d’un chagrin d’amour donc.

-Le site de Burd Early