Ces Anglais qui s’exportent très bien du côté de la Big Apple savent faire parler les guitares de seconde main. Quatuor majoritairement représenté par le sexe faible, Kaito démontre qu’on peut faire du rock incroyablement élégant et punk avec les moyens du bord. Irrésistible.


Tiens, un groupe de garage, mais d’où peut-il bien provenir d’après vous ? New York ? Perdu! C’est du bon vieux pays du pudding, plus précisément Brighton, que nous vient ce lumineux quatuor. Mais vous le verrez plus loin, la liaison n’est pas si hors sujet que ça. Kaito fait dans le rock brouillon arty. Alors oui, on sait, l’info peut prêter à sourire tellement cela en devient ridicule « encore un énième ersatz de Sonic Youth », les gens commencent à tourner le dos dès qu’ils entendent ces mots-là : arty, garage, New-York. Et c’est vrai qu’il faut faire le tri au beau milieu de cette pléthore d’arrivages hostiles.
Mais le fait est là : le rock n’a jamais été aussi propice qu’en 2004, alors pour peu qu’on ignore des groupes de la trempe de Kaito, mieux vaut prendre ses précautions avant, histoire de ne pas avoir le sentiment d’avoir loupé quelque chose dix ans plus tard dans une compilation Nuggets version 2015.

Le groupe se compose de trois filles et d’un garçon : Niki Colk au chant et à la guitare, Dave Lark à la guitare, Gemma Cullingford à la basse et Dieta Quantrill à la batterie. Porté par la vague Riot Girrrls auxquelles le groupe est assimilé, cette formation se veut tout de même moins bordélique que le modèle Erase Errata, et surprendrait même par son lot de mélodies bonbons.

En activité depuis près de sept ans, nos quatre brouillons sont plus appréciés aux Etats Unis que chez leur mère patrie. Remarquez, c’est un peu normal vu l’influence new-yorkaise et tout ce qui se trame là-bas en ce moment.

Leur signature chez Mute est l’aboutissement de tournées intensives aux Etats-Unis aux côtés des Yeah Yeah Yeahs, The Rapture, Radio 4 et Liars entres autres, soit la crème New Yorkaise. Ce second album, enregistré au studio The Sickroom à Norwich, a été co-produit par Owen Turner des post-rockers Magoo.

A voir comment ce quatuor entretient l’usage de la guitare, Kaito serait un peu plus porté vers le Velvet de Lou Reed voire les Slits, pour ce sens du rudiment « saillant », comme l’atteste le single « Should I ». Contrairement à ses contemporains parfois un peu durs d’accès, ce groupe-là possède réellement un don pour faire sonner ses guitares désaccordées avec brio. Là où l’on ne peut entendre que bruit et discorde, Kaito parvient même à insuffler un peu de poésie à ce carnage en règle. Chez Kaito règne une évidence : le fun se mêle à ce faux bordel et pourrait faire passer la pilule à n’importe quel allergique du bruit de casserole.

Niki Colk chante comme une adolescente en pleine explosion de puberté, indécise coincée encore entre le besoin d’irrévérence et une éducation pieuse. Tout cela ressemble forcément beaucoup aux premiers Blonde Redhead. Et puis l’album, malgré l’handicap technique est étonnement éclectique : « Try me out », avec sa bonne humeur irrésistible et ses refrains bondissants dégagent une fausse nonchalance fédératrice. « Nothin New », petite pause avec un vieil accordéon façon romantico-punk, calme un peu les esprits. Le groupe contient aussi quelques pixieseries salutaires, telles que les impitoyables « Anamoy », « A.S.A. To Accuracy? » et  » 3am », qui doivent faire leur petit effet sur scène.
D’ailleurs, à l’écoute des inédits live placés en fin de disque et quelques chroniques élogieuses, on les imagine facilement bondir comme des puces à l’unisson et crever le plancher, voire les coeurs. Forcément, avec deux filles, ça aide. Diablement efficace et élégant.

Le site de Kaito