Le premier « vrai » disque français de l’année qui a séduit Pinkushion. Et pour cause : inventif, varié, ambitieux… Les adjectifs ne manquent pas pour qualifier ce très bon album.


Ah Camille… Deuxième album (après Le sac des filles) de cette surdouée qui n’en a pas l’air. En fait, vous la connaissez déjà si vous avez eu entre les oreilles les reprises bossa nova frenchie de Nouvelle Vague (entre autres, celle des « Guns of Brixton » des Clash ou le « Making plans for Nigel » des XTC sont excellentes). Elle a aussi déjà collaboré avec Murat. Jeune fille diplômée de Sciences Po, Camille sait aussi se la jouer en solitaire, et arrive dans la musique comme auto-didacte.

Dès « Ta douleur », outre des paroles à fleur de peau (qui sont la résultante d’une certaine idée de l’écriture), on est surpris par cette utilisation inaccoutumée des bruits sortis de la bouche et qui ont tellement la cote depuis les derniers Björk et Tom Waits : la human box qu’on l’appelle. Elle pose sa voix par dessus, comme une nappe que l’on dresserait sur une table rocailleuse, d’une simplicté désarmante. Sa voix – parlons-en – est d’une richesse assez époustouflante, et elle semble bien définir « La jeune fille aux cheveux blancs ».

Faisant appel aux percussions, cet album dénote surtout par sa sobriété instrumentale. On s’est limité au strict nécéssaire, et ce n’est pas plus mal.

Mais Camille, telle une schyzophrène, a deux facettes. « Baby carni bird » rentre plus qu’ostensiblement dans le monde de la soul sirupeuse d’une Erikah Badu. Ce qui démontre, s’il fallait encore le faire, les prouesses vocales dont elle est capable. Dans la plus pure tradition de la chanson française, Camille sait nous séduire avec des titres comme « Pour que l’amour nous quitte », d’une beauté que l’on croyait évanouie, tout en y injectant une petite lamentation digne du flamenco. Et l’on se dit qu’elle sait métamorphoser les bassesses qui nous entourent en châteaux des monts et merveilles. En clair, avec elle on s’évade.

Les paroles ont – aussi – du mordant. La série des « Janine I », « II » et « III », qui tels les enfants qui vous posent à tout va pourquoi ceci pourquoi cela, pourraient être le pendant musical des Exercices de Style de Raymond Queneau, ou de l’absurdité artistique d’un Magritte. Oui, les comparaisons semblent haut-perchées mais elles sont assez justes. Ce disque émerveille, après avoir dans un premier temps largement désarçonné. Loin des calibres usuels, Camille prouve que l’on peut allier expérience et mélodie, audace et beauté. Cette ligne amène à Bjork, dont on a parlé plus haut, qui semble toujours être là, à inspirer notre jeune femme.

Un disque français qui marquera cette année. A coup sûr.

-Le site de Camille

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