Est-ce de l’impro tout ça ou est-ce que chaque note est amenée avec précision? Les anglo-saxons ont affublé le genre d’un nouveau nom : l’avant-rock. C’est par ici.


Suite au deuxième album, on était loin de se douter que les quatre demoiselles qui forment Electrelane, souvent comparées, à tort ou à raison à Stereolab (mais dont elles ont toutefois couvert la tournée en tant que support act, et chez qui elles reconnaissent une inspiration fondatrice) reviendraient à un rock plus brut, très proche d’un Sonic Youth instrumental, sorte de laboratoire de la musique contemporaine pour piano et guitares acérées… En fait, satisfaites du son qu’elles produisent sur scène, elles ont voulu accoucher d’un album studio dans les conditions du live.

En effet, on notait, à la sortie de The Power Out, ce chant multilingue et cette chorale qui amenaient une certaine fraîcheur et une originalité. Ici, à part quelque exceptions comme « Bells » ou « Two for joy », le chant est plutôt aux abonnés absents, mettant en exergue l’instrumental. Précisons toute fois que lorsqu’il est présent, il suit cette même veine que le Velvet Underground et Sonic Youth, à savoir un chant monocorde frisant la fausse note constamment, donc en fin de compte toujours mettant en valeur le décor sonore ce qui est rarement le cas en fait.

A l’écoute de l’album, les titres défilent mais ils pourraient tout aussi bien former un tout tant l’ensemble se tient parfaitement, et tant surtout on voit que l’on est sur la plage suivante, mais on ne l’entend guère.

Sorte de groupe à – noisy – guitares (écoutez « Atom’s Tome »), Elecrelane (Verity Susman aux claviers et saxo, Emma Gaze à la batterie, Mia Clarke à la guitare, Ros Murray à la basse, qui a remplacé Rachel Dalley) mène sa barque de mieux en mieux, au fil des albums. Enfin, on ne change pas une équipe qui gagne, Steve Albini est encore une fois derrière les manettes.

L’utilisation du piano apporte ici un élément nouveau qui aguiche directement. Utilisé en tant qu’instrument à part entière (voir le solo de piano sur « Eight Steps ») mais plus spécifiquement et généralement en tant qu’instrument à rythme (poussé jusqu’à l’extrême sur « If Not Now, When? »), l’instrument (qui vaut bien tout un orchestre selon Chopin) gagne en intensité et en présence dans la musique que nous offre le quatuor. Joué par Verity Susman, chef d’orchestre du groupe (elle a fondé également un label, Let’s Rock! Records) qui a décidé semble-t-il de plus en plus, et ce depuis le dernier disque, d’inclure des éléments issus du classique. Une chorale masculine cette fois-ci figure d’ailleurs dans « I Keep Losing Heart », et une « bisexuelle » sur « Suitcase ».

Mais cela ne s’arrête pas là. La construction du disque, sa structure, sa logique, tout concourt à le comparer à un disque de musique classique contemporaine. Car que penser de l’accord des instruments (rock peut-être, mais instruments quand même, batterie et guitare) dans « Business or Otherwise ».

L’utilisation de l’accordéon et des violons dans « Eight Steps » viennent élaguer cette impression. Le train de la longue plage de « Gone Darker » vient poser l’entracte de ce disque atypique, avec l’intrusion d’un saxo aux côtés de la sirène des chemins de fer. Un peu de free jazz n’a jamais fait de mal en effet. L’album est en fin de compte à l’image de la reprise de « The partisan » de Leonard Cohen : étonnant.

La page d’Electrelane sur Too pure