Stars fait briller une petite étoile polaire dans la constellation du rock indépendant canadien. La famille s’agrandit pour notre plus grand bonheur.


Décomplexée, la scène indé canadienne a explosé ces dernières années offrant à la gloire du rock anglo-saxon de magnifiques présents ayant pour nom Arcade Fire, The Metric, A Silver Mount Zion, Broken Social Scene… Et au milieu, Stars, une petite étoile dont la lueur toute tremblotante nous parvient mieux de ce côte de l’Atlantique depuis la parution de son troisième et magnifique album Set Yourself on Fire.

Le processus créatif de ce disque, engagé durant l’hiver 2004, tient du scénario à la Shining. Le quatuor, chaudement emmitouflé dans ses parkas, a quitté Montréal pour trouver refuge à North Halley (à l’est du Québec) dans le home studio du grizzly Alan Nicholls, ancien rocker reconverti dans la musique de film. C’est là, au milieu d’une étendue neigeuse aussi vierge que leur copie que Stars s’est mis au travail pour accoucher d’un disque optimiste, ambitieux et hybride, de loin l’oeuvre la plus consistante que le groupe ait produite en cinq années d’existence.

Le duo originel, rejoint à temps-plein par deux transfuges de Broken Social Scene, se montre un alchimiste habile possédant à la fois le sens de la mélodie infaillible et la science de la composition soignée. A l’écoute de l’exquise intro « Your Ex-lover is Dead », les codes artistiques du disque sont posés : paroles mordantes, mélodies limpides, arrangements complexes sous une apparence sucrée… On ne sait pas de quel bois le groupe s’est chauffé, mais il est certain que les idées ont jailli comme du crépitement d’un feu de cheminée, encouragées par Tony Hoffer, producteur aguerri au côté d’électrons libres aussi divers que Beck, Grandaddy, Air ou Phoenix.

Arrangements de cordes et de cuivres moelleux, pluie de notes de piano douceâtre et harmonies vocales soyeuses tissent un cocon où il fait bon se lover au creux de l’hiver canadien. Les climats et les tempos varient d’une chanson à l’autre entre comptines lancinantes au format symphonie de poche et morceaux de power-pop héroïque mâtinés d’electro (Set Yourself on Fire, Ageless Beauty), le tout entraîné dans une cavalcade énergique par les trois petits chefs-d’oeuvre mélodiques que sont, tous genres confondus, « The Big Fight », « What I’m trying to Say », « One More Night ». Mais Stars ne se contente pas de l’euphorie du champagne et des space-cakes consommés sans modération pendant les séances d’enregistrements solitaires : non, avec « He Lied About Death », au trois-quart du disque, il nous montre une facette plus torturée de sa personne, en se frottant à une sorte de jungle hypnotique proche des productions de The Third Eye Foundation et de The Notwist. Preuve supplémentaire d’un songwriting protéiforme qui ne saurait se borner à l’exercice de style inspiré.

On ne tarira pas d’éloges non plus sur le mariage des voix d’Amy Millan et de Torquil Campbel, mélange de douceur et de force illuminant des compositions dont les mauvaises langues pourraient dire qu’elles sont peut-être un peu trop sages ou répétitives à la longue (les trois derniers titres tournent en rond, effectivement !). Mais reconnaissons une chose, la force de Stars réside dans l’art de sonner « simple » en jouant « compliqué », de brasser les genres tout en préservant un ensemble homogène, vif et entraînant, toujours porté par des guitares aériennes, des refrains amples et des mélodies à la ligne claire. Comme si ce disque rendait un hommage discret au savoir-faire des Smiths, des HouseMartins et de Beautiful South. Des références célestes prégnantes qui méritent bien à cet album de briller de mille feux dans toute bonne discothèque.

-Le site officiel de Stars
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