Petit post-it joint avec le CD : « Voici mon premier album électro-ambient. En espérant que ça plaira. »
Oui, ça nous a plu.


S’il y a bien un genre – pourtant souvent oublié – qui représente notre époque globalisante et mondialisée, c’est l’ambient. Depuis que les allemands – à la pointe du progrès alors – ont lancé la chose avec Kraftwerk (l’album Radioactivity) ou Tangerine Dream, les anglais ont écrit l’histoire du genre surtout dans les années 90, profitant du grand boum électro. L’ambient est un genre bien particulier, aussi éloigné des formatages de quelque sorte que ce soit que des ondes traditionnelles commerciales. En d’autres termes, en ambient, tous les coups sont permis, il n’y a pas de loi, si ce n’est qu’il n’y en a pas. Que l’on pense à des choses aussi différentes et alternatives que Future Sound Of London, qui a exploité la chose jusqu’à la corde avec des vidéos plus abstraites que ça tu meurs, Aphex Twin qui a exploré son côté noir, ou de The Young Gods, qui est allé jusqu’à écrire la bande originale de conférences d’anthropologie ou d’expos de musée, ce genre est souvent relégué – à tort – dans la sous-catégorie « décorative », littérale d’ambiance, d’atmosphère (j’ai une gueule d’atmosphère ?). Ce genre est bien plus riche qu’il en a l’air, et chatouille même la musique classique contemporaine.

Cette musique, si on devait se risquer à la définir, on pourrait dire qu’elle est lascive (ce qui ne veut pas dire lassante), aux formidables vertus de relaxation et d’évasion (à ne pas confondre d’ailleurs avec l’insipide soupe récupératrice Liebig de la mode New Age). Oui, l’ambient, c’est la musique d’un film que vous ne verrez jamais, l’exploration de la planète X-Tron par la fusée chromosome Y. Une chose est sûre : soit on s’oublie, soit on réagit, et c’est ce qui fait la force de cette musique sans frontières, asexuée et aculturelle… La bande sonore inspirée des Chroniques martiennes.

A ce propos, on remarque que l’ambient est originaire des pays les plus industrialisés (Allemagne, Angleterre, Japon). On a raison, et cela changera probablement au gré de la vitesse à laquelle le progrès s’installera dans d’autres sphères : en d’autres termes, la musique électro chinoise ou indienne ne devrait plus trop tarder à débarquer chez nous. Miam Miam!

En attendant, intéressons-nous au premier album d’un Suisse (encore un pays pauvre tiens), Roberto Vitali, que l’on pourrait qualifier de compositeur moderne. Si on ne devait juger pourtant que sur la pochette, le CD n’aurait pas quitté son étui. Dans le genre « comment faire une pochette dégueu pour bien dégoutter tout le monde », il fait très fort. Je parie qu’on aurait un mal fou à le revendre aux solderies ce disque. Sûrement, les moyens n’étaient-ils pas à la hauteur des espérances, mais enfin là… Non, ce qui a éveillé la curiosité c’est le petit post-it, écrit de la main de l’artiste lui-même joint avec ce CD : « Voici mon premier album électro-ambient. En espérant que ça plaira« . On pourrait parler longtemps de tous les CD que l’on reçoit, et surtout de tous ceux qui émanent directement d’artistes n’ayant pas trouvé de distributeur Lambda. Vu notre bénévolat en la matière, on peut – encore heureux – s’intéresser à tous ceux qui sont là, sur le bas côté, en attente sinon d’une reconnaissance publique, au moins d’un intérêt fut-il minime pour leur oeuvre. C’est aussi à ça que sert le net non ? On imagine, du coup, les dégâts que produisent le silence, et encore plus la critique mauvaise (quoique, c’est sujet à débat). Ceci dit, je tiens à rassurer tout de go tout le monde : le CD ci-présent est bon, et il vaut vraiment la peine qu’on s’y attarde.

La première plage – elles sont toutes longues, pour un album qui avoisine une heure vingt, mais qu’on ne voit pas passer – « Ambient work », est du pur de chez pur : très statique, aérien, proche des derniers travaux de Young Gods, avec cette touche d’organique et d’anxiété palpable. Le méditatif « Stellar » est dans la même veine et aurait sans doute mieux servi Le Grand Bleu que ne l’a fait Eric Serra. Faire la musique d’un film devrait faire partie des ambitions de Roberto Vitali, car il a un don particulier à faire passer les émotions par sa musique.

D’autres plages – oui, avec cette musique océanique (« one day » et son parlé dauphin en témoigne), on préférera utiliser ce genre de termes… – telles « Extrem » , et surtout « Robotik Life » et « Keep On Moving », évoquent plutôt toute la tendance électro qui va d’Aphex Twin à Future Sound of London en passant par Orbital ou Autechre. « Transformer » et son ambiance industrielle est à rapprocher de cette tendance également. On peut même aller jusqu’à penser aux expérimentations sonores si chères aux canadiens de Constellation, tel Re: .

Pour répondre au petit post-it de Roberto Vitali : oui, ça nous a plu. On vous souhaite ze best.

Le site du distributeur en France