Plan marketing judicieux ou foutage de gueule intégral ? Les deux vont parfois de pair…


Qui ne connaît pas encore Telex ? Ce Kraftwerk belge (terme avec lequel on peut – on doit ! – être en désaccord), que des artistes comme Daft Punk, Jeff Mills ou Moby – à savoir : trois poids lourds des ventes commerciales – citent dans leurs influences sur l’autocollant qui accompagne le disque ci-présent (ah, marketing quand tu nous tiens), tient plus de la franche rigolade – voire pantalonnade – que du groupe musical stricto sensu. De plus, Daft Punk, avouons-le, passée la ferveur du premier album n’a plus trop apporté quoi que ce soit, et ce malgré l’admiration que lui voue un Murphy. Quant aux deux autres, à part offrir aux publicitaires des bandes sonores parfaites on ne sait pas trop si ce sont des références nec plus ultra… Il fait penser d’ailleurs à Stellla (autre attrape-nigaud belge), à savoir une blague qui a bien tourné et qui a permis à d’aucuns de se remplir les pockets de big fat money (plus de deux millions de disques vendus, et des royalties qui tombent encore chaque année rien qu’avec « moskow diskow ») en faisant le minimum, même si l’intention première était de se moquer du système dont ils finissent par bénéficier.

Un petit rappel historique s’impose. Formé en 1978 à Bruxelles par Marc Moulin (claviériste), Michel Moers (voix) et Dan Lacksman (producteur), le trio lance le bazar comme un joke auquel ils ne croient qu’à moitié. Etiqueté par eux-mêmes comme un projet electro-disco-pop, ils ne dédaignent d’aucune façon leur vocation Kleenex, à savoir jetable. Connaissant les chroniques piquantes et humoristiques actuelles de Marc Moulin (notamment dans l’hebdo belge Télémoustique), on ne peut que sourire devant – il est vrai – cette vision détachée mais ô combien réaliste de la société de consommation dite moderne.

Leur succès, ils le doivent à un humour belgo-belge d’autodérision autoproclamée, se servant des reprises comme d’autant de teasers qui font mouche. « Twist à St Tropez » (de Dick véridique Rivers), « ça plane pour moi » de Plastic toc Bertrand, « Rock around the clock » de Bill Haley, « Dance to the music » de Sly & the family stone ou « The Look of love » de Burt Bacharach ont tous été massacrés par leur soin. La blague dépasse toutes les espérances lorsqu’ils défendent, sans rire, les couleurs de la Belgique à l’Eurovision avec le but avoué de devenir les plus gros perdants. Ils finissent avant-derniers.

Résultat des courses impressionnant : 5 albums, une image culte enviable, une liberté artistique totale en solo pour Marc Moulin qui décroche pour ses disques jazzy easy listening un contrat chez Blue Note… Quand à Dan Lacksman, il prouvera encore une fois son talent dans la musique consumériste bobo de Deep Forest

Parlons de l’album. Peu car il ne mérite pas qu’on s’y attarde. Fidèles à leurs coutumes, ça commence et ça finit par des reprises : « On the road again » (Canned Heat), dans la veine de Daft Punk deuxième couche (beurk!) et un « La bamba » plus nul que ça tu meurs. Comme dans un sandwich, il y en a même au milieu : « Jailhouse rock », qui ne rattrape pas pour autant la qualité médiocre des tranches de pain. Alors, oui, il y a un « How do you dance? » ou « #1 song in heaven » (tiens, encore une reprise des Sparks…) en guise de cornichon et de rondelle d’oignon qui se laissent goûter, mais pas déguster. Faut pas rêver.

Telex prouve qu’en effet il y a moyen de faire de la mal-musique, comme il y a moyen de faire de la malbouffe. Des titres comme « J’aime la vie » sont d’une simplicité effarante, voire exaspérante, mais c’est ainsi que l’on reconnaît les producteurs doués. N’oublions pas que Marc Moulin a à son actif « Banana split » de Lio ou « Traces de toi » d’Alain Chamfort comme producteur.

Tout le monde sait que leurs comptes en banque vont être fournis, que ses tubes minables vont passer à la radio, que leur auto-reconnaissance de vaurien va leur valoir toutes les fleurs et tous les mérites. Alors, que demande le peuple ? Ils auraient tort de se gêner, non ?

Le site de Telex