Mélodies brillantes, guitares brouillonnes et bon esprit de groupe, The Spinto Band livre un premier album aux airs de compilation du gratin rock indépendant. Cela tombe bien, c’en est une !


Pour ceux qui n’ont pas lu les Inrocks ou Libé la semaine dernière, l’aventure The Spinto Band a démarré au milieu des 90’s, plus exactement dans le grenier familial de Nick Krill. C’est en fouinant un dimanche après-midi dans les cartons que le jeune homme met la main sur le trésor de feu son grand-père, Ray Spinto : des dizaines de boites remplies à ras bord de partitions composées par pépé. Frappé par la lumière, le digne petit fils se voit immédiatement investi d’une mission de réhabilitation, former un groupe et prêcher la bonne mémoire de son grand père.(…) (…) (…) (…) Quelques non promesses tenues plus tard, The Spinto Band n’a pas enregistré ce fameux album, mais a gardé le nom en guise d’hommage au grand paternel. C’est toujours ça de pris pour (Me and) Mr. Ray.

Voilà pour le folklore. Techniquement parlant, The Spinto Band a bien failli être frappé par la malédiction du grand-père : croupir dans l’ombre si la fée myspace ne s’était pas penchée sur son sort. Depuis près de dix ans, le groupe accumule des dizaines de démos dans sa bourgade perdue de Willington dans le Delaware (United States of America). Subitement portés par la blogosphère, Nick Krill (guitare, chant), Thomas et Sam Hughes (clavier), Joe Hobson, Jon Eaton (guitares) et Jeff Hobson (batterie) se voient propulsés de simple de groupe MJC en nouvelle sensation indie rock, avec la promesse d’un album décemment distribué à la clé.

Question substantielle : peut-on prendre au sérieux un groupe sorti de nulle part, livrant le meilleur de ses dix ans d’activité sur son premier album ? A raison d’une chanson par an – le disque est très court – on ne peut pas dire que Spinto Band se soit retroussé les manches pour mettre les mains dans le cambouis : difficile de louper le coche dans de telles conditions de non péremption. Quelle étrange situation que de compresser dix ans de carrière sur un cd et faire table rase de 90% de son matériel… Est-ce qu’ensuite le meilleur sera à venir, puisque tout a déjà été donné ? Mais qu’on ne se méprenne pas, la qualité de ce disque n’est pas remise en cause.

Pour l’heure, le bien nommé Nice and Nicely Done est une excellente livraison de power pop tendance bricolo. Afin de mettre un peu d’ordre à tout ce bordel lo-fi, on a recruté un producteur multi casquette, Robin Eaton, capable de faire figure de professionnalisme : tenir les manettes d’une console studio, accorder les instruments et faire des crêpes en même temps. Bref, un vieux briscard. Et il faut admettre que le produit final a de la gueule.

La petite triplette du début enfonce à chaque fois progressivement le clou, bien profondément. Difficile de ne pas succomber à l’énergie contagieuse de “Did I Tell You””, intensifié par “Brown Boxes”, de la power pop dynamitée qui frise le délire. Sur le superbe “Oh Mandy”, l’humeur se rapproche d’un Clap Your Hands Say Yeah, mais avec ce je ne sais quoi d’âme écorchée en plus qui remet en question bien des opinions…

Le reste de l’album s’effeuille un peu plus lentement, entre guitares dissipées de l’école 90’s et synthés rigollots poilus. Jamais redondant (bref rappel : 10 ans, 10 chansons), on y danse régulièrement (“Crack the Whip”), on se ballade du côté du parc de Strawberry Fields (“Direct to Helmet”) et puis ça rock à grand coups de choeurs en hoooo wa hoooo (“Mountains”). S’il y a bien une constance dans ce groupe, c’est cette pêche générale qui vous réveille du bon pied. On ne regrette pas du tout la promenade.

Très bonne pioche, Nice and Nicely Done donne envie d’entendre leurs démos en stock (aucune trace sur leur site, les ingrats) histoire de se faire une petite idée du potentiel des versions originales. Des fois que The Spinto Band ne serait pas frappé du syndrome lo-fi d’un Guided By Voices

-Le site oficiel de The Spinto Band

-Leur page Myspace