Groupe de Chicago formé autour de Emmett Kelly, ex-guitariste de Beth Orton et Edith Frost, The Cairo Gang tire son inspiration de la tradition folk anglaise en lui donnant une sonorité contemporaine. Avec ses mélodies légères mais assez alambiquées pour témoigner d’une certaine personnalité, ce premier album cherche un subtil équilibre entre le chatoiement de la ballade traditionnelle et la fêlure de la dissonance harmonique. Grâce en partie à la voix délicate de Kelly, émergent quelques jolis moments contemplatifs (“Bones in the Ground”, “Turbulent Water” ou “Zyczekowy”). La récurrence des flûtes rend perceptible l’empreinte de Nick Drake, même si c’est surtout du côté de Donovan que penchent les chansons les plus abouties (“Mother Earth”, “Last Time Since September”). Malheureusement, le choix délibéré de laisser la plupart des morceaux à l’état d’ébauche donne souvent des résultats peu probants, et l’on parvient mal à saisir l’utilité des intermèdes bruitistes qui les accompagnent. Par ses échecs, ce disque montre à la fois les limites de l’esthétique lo-fi, qui donne ici le sentiment d’être trop affectée pour être sincère, et confirme que toute tentative du côté du post-rock est d’abord une affaire d’alchimie, qui ne se décrète pas. Malgré un talent réel, les esquisses que Cairo Gang se contente de soumettre à nos oreilles laissent l’impression d’une certaine complaisance, écornant le charme qui s’attache habituellement au folk.