On dit souvent que la réalité dépasse la fiction. Cet article tente à prouver qu’effectivement, dans ce qui va nous intéresser ici, on sera étonné de voir comment la réalité dépasse non pas la fiction, mais carrément la caricature.


Il s’agit de deux artistes qui ne sont pas des premiers venus et ont marqué, chacun à leur manière, l’histoire du rock. Le premier, The Melvins, 20 ans de carrière et une vingtaine d’albums, pour son approche particulière de la musique (bel euphémisme n’est-ce pas ?), le deuxième, Ozark Henry, 10 ans de carrière et 6 albums, pour son volume de vente (80000 copies écoulées de son dernier album, ce qui est franchement pas mal pour un petit belge).

ozarK.jpg Les pochettes d’abord. Il faut, dans le cas présent, vraiment se fier de prime abord au figuré comme étant le propre. D’un côté, une pochette arborant un type en scaphandre. De l’autre, une photo en noir et blanc de Piet Goddar (son vrai nom), de profil, vent en option sur une coupe de tifs originale. Comparons les titres à présent : A Senile Animal (no comment) et The Soft Machine (no comment). Deux conceptions bien différentes donc, rien qu’à regarder les pochettes. Les labels aussi valent le détour : The Melvins chez Ipecac, le label de Mike Patton, Ozark Henry chez Epic…

L’aperçu des titres en dit – lui aussi – long sur la marchandise. Jugez plutôt (et devinez quels titres appartiennent à qui). D’un côté, « Blood Witch », « A History of Drunks », « Rat Faced Granny », « A History of Bad Men »… De l’autre, « These Days », « Christine », « Weekenders », « Echo as Metaphor », « Morpheus », « Sun Dance »…

Ouvrons à présent les deux livrets et confrontons les photos. Chez Ozark Henry, des papillons (c’est pas une blague) ainsi que des photos en bord de mer (et vas-y que je te mets le phare, et la digue, et une éolienne). Chez The Melvins, un crocodile, un militaire armé, un cochon. Ah oui, j’oubliais, on retrouve des portraits des artistes/musiciens : quand chez l’un il s’agit encore de portraits de profil (toujours, et quatre !), chez l’autre on a droit à leurs tronches de cake, en sueur, avec une couronne. En gros, l’un se prend au sérieux et offre à voir des photos très conventionnelles, les autres font dans l’autodérision et dans des photos atypiques.

Et si on s’intéressait un peu à la musique, trouverait-on encore des traits aussi caricaturaux ?

Le belge, peintre à ses heures perdues (sans blague) montre une production léchée (merci Pro-Tools), un trip-hop politiquement correct (on jurerait la fin de « Splinter » piquée à « Karmacoma » de Massive Attack), des ballades à la Coldplay, et surtout des refrains et des constructions à la Sting (on ne sait plus si c’est un compliment ou une tare). En gros, une musique qui a tout pour plaire aux ondes radio et aux bars lounge.

Les américains, couillons à leurs heures perdues (sans blague), nous offrent un métal abreuvé chez les punks qui s’offre le luxe de deux batteries et de deux chanteurs. Ça gueule dru, ça bazarde des riffs couillus, ça balance la sauce à tout va, ça fait penser à Black Sabbath (comme quoi, ce n’est pas un hasard qu’il y ait un Osbourne). En gros, une musique que papa ou les voisins qualifieront de bruit de sauvageons (à l’exception peut-être de la «ballade» « Civilized Worm »).

Il s’agit bel et bien, dans la forme comme dans le fond, de deux conceptions diamétralement opposées, non ?