Après un passage à vide, le dandy suédois nous revient avec ses plus beaux arguments. Vous reprendrez bien un doigt de Whiskey ?


On le croyait définitivement perdu, Jäje. En 1996, le Suédois nous gratifiait de son premier album, Whiskey, fort de quelques titres mémorables : “So Tell The
Girls That I Am Back In Town”, “It hurts Me So” ou “I’m Older Now” . Deux ans plus tard, il s’affirme avec Tattoo puis confirme en 2000 avec Poison,
complétant ainsi un triptyque de toute beauté, mélangeant sa voix cristalline, androgyne, à un trip-hop d’abord joyeux (Whiskey), devenu classieux (Tattoo),
puis ténébreux et glacial (Poison). Jusque-là, tout va bien.

Puis vint l’inaudible Antenna (2002) : Jay-Jay se met au service d’une électro des plus minimales, alors qu’il n’était déjà plus l’heure. Froid et ennuyeux,
Antenna fait fuir ses fans. Son cinquième opus, Rush (2005), tente de rattraper le coup, sans revenir à ses premières amours. L’electro mis de côté, c’est de la
scène house frenchy dont il s’inspire. Sans être brillant, l’album est agréable.

Du coup, on était certes dans l’expectative mais également impatient avant de déchirer le plastique de ce sixième album studio, The Long Term Physical Effects
Are Not Yet Known
. On contemple d’abord la pochette. En icône hitchcockienne sur celle de Poison et en Ziggy Stardust swedish sur celle d’Antenna, il imite
cette fois la pose du pianiste jazz Bill Evans sur la pochette de Sunday At The Village Vanguard (1961). Un clin d’oeil pour ce fan de jazz, initié par son père
et fan de Chet Baker.

Et côté musique, on n’est pas déçu. Tous les morceaux ont été composés, arrangés et produits par ses soins et enregistrés avec les mêmes musiciens que sur ses trois premiers albums. Et ça se sent. Jay-Jay opère un retour aux atmosphères denses, mystérieuses et ouatées sur lesquelles il travaillait à la fin des années 90. Son timbre si particulier met parfaitement en valeur ses
textes mélancoliques, évoquant la solitude, les regrets et les voyages.

Et pour marquer son retour, le maigrichon attaque direct, nous glisse dans les oreilles pour commencer un chaleureux vibraphone, une cadence monotone et sa voix envoûtante sur “She Doesn’t Live Here Anymore”. Il persiste et signe avec “Time Will Show Me” qui débute sur un arrangement qu’Eminem n’aurait pas renié avant de s’envoler lors du refrain.

Il y a probablement dans ce disque les chansons les plus jazzy – au bon sens du terme – qu’il ait réalisées, à l’instar de “As Good As It Gets”. Suivi d’une
chanson à la tristesse magnifique : “Only For You”. Plus Poison, “Jay-Jay Johanson Again”, avec son ton proche de Portishead, et une entame à la Clint
Mansell
, vient nous rappeler que Dummy avait été un révélateur pour le jeune Jäje. Après le délicat “New Years Eve”, Jay-Jay rend hommage à “Requiem Pour
Un Con” sur “Tell Me When The Party’s Over”.

In fine, malgré quelques morceaux plus insipides – “Coffin”, “Rocks In Pockets” ou “Peculiar” -, le Suédois a rempli son contrat. The Long Term Physical Effects Are Not Yet Known est un retour aux sources, un disque
obsédant, touchant et néanmoins puissant. Reprenant sa vieille marmite, ses meilleures recettes, il nous offre un opus proche de ses meilleures productions.
Pas de doute, Jay-Jay is back in town.

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