Tu es ma mauvaise dépendance, j’essaie de ne pas t’aimer comme je le fais (mais ça ne sert à rien…).


Une chose est sûre et certaine : Joss Stone et les artistes poids lourds (en nombre de disques s’entend) n’ont vraiment pas besoin de petits sites internet pour doper leurs ventes… Oui, c’est vrai, quoique… Une autre chose est certaine : On ne parle sur Pinkushion de R & B que si ça en vaut la peine. Enfin, bref, depuis Leela James, qui nous avait fait un effet boeuf, on ne se bouscule pas au portillon…

Et voilà qu’arrive la sensuelle Joss Stone, qui n’est pourtant pas une fraîchement débarquée de la planète R & B, elle qui a commencé à 16 ans ! Les premier et deuxième album, aux pochettes très seventies, ne nous avaient pas laissé un souvenir mémorable, et ce malgré des prix à la pelle et des ventes dépassant les sept millions. La jeune anglaise a beau préciser que c’est le premier album « authentique » – entendez heuristique – d’où son titre qui se veut plus qu’explicite et peut surprendre sachant qu’il s’agit d’un troisième album, on est, de prime abord, réticent car cet argument fait partie généralement de l’attirail du parfait manuel de marketing des majors. A 19 ans, Joss Stone est maintenant une femme, et non plus une gamine. Par contre, la pochette du premier opus aurait mieux emballé l’affaire…

Soutenue (le milieu veut cette ambivalence) par Raphael Saadiq (The Roots, Macy Gray, Erikah Badu), Joss Stone nous refait visiter les années 70, celles de la soul à la Aretha Franklin et des The Supremes, voire de Donna Summer (la fin de « Bad Habit »), le tout revu et visité par les us et coutumes du hip hop (on retrouve d’ailleurs les diatribes de Common sur « Tell Me What You’re Gonna Do Now » et Lauryn Hill sur « Music »), à savoir les beats survoltés et la basse en relief (souvent jouée par Saadiq himself). La soul toute en splendeur, avec ses choeurs, les violons et des guitares électriques à la Prince ne viennent que renforcer la première très bonne impression que livre le disque. Bénéficiant d’une voix afro-américaine exceptionnelle (dont elle n’abuse guère), la jolie rousse nous offre un disque R & B de très bonne facture, d’une qualité indéniable. On est dans la pure tradition du genre, ballades comprises (il n’y en a que trois sur 14 morceaux), sans faire comme ses contemporaines qui en abusent clairement. Ici, les ombres de tous les grands de la soul et du R & B sont toujours en filigrane.

Après une intro de Vinnie Jones sur les mérites du « Change » qu’opère ici la chanteuse, on rentre directement dans le vif du sujet avec un tube en puissance, « Girl You Won’t Believe It », dans la pure tradition des girl bands des sixties, tout comme « Tell Me ‘bout It » et « Put Your Hands on Me ». « Headhunter », incluant le « Respect » d’Otis Redding, montre sur quelles terres elle veut jouer : «Work it, girls we gotta work it like we do». « Music », profession de foi s’il en est, qui semble répondre au « Music » de Leela James (dont l’album s’appelait « A Change has come »…), recèle la même puissance soul que cette dernière…. « Music Outro », est à se morfondre, tout comme la ballade « What Were We Thinking » (mais j’ai un défaut, j’adore les – bons – slows R & B avec force cuivres et arpèges). Enfin, notons une rythmique huilée à la perfection (« Arms of my Baby », « Bad Habit »), à même de faire chavirer toute la baraque (le processus utilisé sur « Proper Nice » – on a l’impression de vivre dans le caisson de la baffle !- est à se pâmer).

I’m so in love with my music. Elle n’est pas la seule.