Alliez des synthétiseurs rétro-futuristes qui vous glacent le sang à l’énergie épique de Trans Am, vous aurez une idée de ce que tente de dynamiter 120DAYS.


Quelque part dans les fjords norvégiens, la petite île de pêcheur Kristiansund mène un combat éternel contre les vagues qui viennent gifler ses récifs et régulièrement emporter ses marins pêcheurs. C’est dans la longue nuit polaire de 2001 que quatre jeunes étudiants, Ã…dne Meisfjord (chant, guitare, synthétiseurs), Kjetil Ovesen (synthétiseurs), Arne Stöy Kvalvik (boite à rythme, effets) et Jonas Dahl (basse) décident de libérer leur frustration insulaire en formant The Beautiful People. Difficile de trouver environnement hostile plus propice !

Après deux EP sortis en 2004, leur post-punk à guitare se dilue via de nouvelles influences Krautrock, rechargées par des textures électroniques prédominantes. Le quatuor a entretemps migré vers Oslo et troqué son patronyme pour 120DAYS, hommage rendu au chef-d’oeuvre décadent de Pasolini. Remède radical à la canicule, le combo norvégien se fait remarquer dans les festivals estivaux, notamment Sonar à Barcelone, et signe dans la foulée chez le label Smalltown Supersound (Lindstrom, Jaga Jazzist…).

Si les noms de The Cure, Suicide, Kraftwerk ou encore les Spacemen 3 reviennent régulièrement sur papier à l’écoute de leur album éponyme, personnellement, c’est plutôt l’image de Los Angeles qui nous vient à l’esprit : celle nocturne, sale et paranoïaque dépeinte dans les scénarios de science-fiction d‘Invasion Los Angeles et Terminator. Car si ces extra-terrestres ne nous venaient pas de Norvège, on mettrait notre main à couper que le grand John Carpenter est l’instigateur de cette bande-son urbaine crépusculaire, tout droit échappée d’une vision glauque mais divertissante des 80’s.

Emanation directe de cette vision d’apocalypse, leurs synthétiseurs analogiques et guitares écho décalquent les routes larges et infinies, absentes d’humanité, de la Cité des anges : les sinueux “Come Out, Come Down, Fade Out, Be Gone” et “C-musik”, tunnels qui dépassent allègrement les 8 minutes, profèrent une transe robotique fascinante. Lorsque pas moins de trois synthétiseurs analogiques se relayent, le degré de radioactivité monte invariablement dans le rouge. Mais qu’on ne se méprenne pas sur leur ambition, cette approche empirique des claviers est bien le véhicule d’une urgence rock’n’roll. Mené à un train d’enfer par une boite à rythme épileptique et un spectre de guitare électrique, la course-poursuite infernale contre le T1000 tourne au carnage avec sur les brûlants “Get Away” et “I’ve Lost My Vision”. Dans ces instants cruciaux où les riffs irradiés et le chant hystérique d’Ã…dne Meisfjord mènent un combat de front contre la machine, ce soulèvement aboutit à une discorde extatique, comme si Iggy Pop en plein dans l’abîme The Idiot s’était raccommodé avec les frères Asheton. Voilà peut-être finalement le disque futuriste que l’on attendait des Stooges en 1977. Retour vers le futur.

– Le site de 120DAYS

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