Ou lorsqu’un duo de furieux s’emploie à dynamiter les préceptes Garage armés de guitares post-punk. Sans conteste la rouste du mois.


Attention, oreilles fragiles s’abstenir ! The Pyramids joue très fort, à s’en exploser les tympans ! Ce puissant duo binaire goupillé par deux membres d’Archie Bronson Outfit (soit exactement les 2/3 du combo), ne nous vient pas du désert d’Egypte, mais plutôt du comté verdoyant du Kent. Déjà, on se pince à l’idée de penser que ces quelques 30 minutes cataclysmiques ont été composées dans une grange en plein milieu de la paisible campagne anglaise. En terme de localisation, on aurait plutôt misé sur une grotte en Afghanistan lors des bombardements américains post-11 septembre.

L’histoire raconte que, tout juste sortis de l’enregistrement du second album d’Archie Bronson Outfit, Derdang Derdang (2006), Sam Windet (aka The Bishop, chant, guitare) et Mark Cleveland (aka Arp, batterie), prennent le large le temps d’un week-end pour plier cet album. Réalisé donc dans les règles de l’art, The Pyramids respire l’urgence et la sueur puante. Leur brûlot de 31 minutes (pas plus) est produit sous la houlette de Head, fidèle homme de main de PJ Harvey. Pour le reste, The Pyramids érige un rock primal et crépusculaire : seulement deux, voire trois accords garage lâchés en pâture avec une violence instinctive et une voix gutturale, toute aussi effrayante. L’éthique est fidèle aux anciens – leur nom s’inspire des parrains Nuggets Question Mark & The Egyptians, The Sonics… – mais le son qui se dégage des amplis fumants est d’une lourdeur viscérale, implacable. Si The Fall et Joy Division rentraient de plein fouet en collision, nul doute que cette chose, qui ne ferait plus qu’un, ressemblerait à The Pyramids.

De leur nom, The Pyramids ont aussi conservé une certaine approche anguleuse et inextricable. Le feedback symbolique d’une guitare stridente sonne l’alerte sur l’inaugural “Pyramidy”, mais c’est sur le riff phénoménal d’“A White Disc Of Sun” que nos rockers pharaoniques font brûler la gomme jusqu’à en crever les pneus. La frappe y est métronomique bien que l’on sente quelques boulons se dévisser du kit tellement The Arp s’acharne dessus comme une teigne. Le troisième morceau enfonce le clou : “Piblokoto” pille un riff cabossé des Kills et le fait tournoyer jusqu’à la transe chamane. Rivé sur son micro, The Bishop est possédé, évoquant une sorte de Win Butler qui aurait vu un fantôme, le regard dément. A deux doigts du meurtre. On est déjà passablement éméché lorsque déboule “Hunch Your Body, Love Somebody” qui écrase tout sur son passage, les peaux de la batterie saignent encore à mort. Nous ne sommes seulement qu’à la quatrième plage et les dommages collatéraux sont déjà conséquents.

Heureusement pour notre cœur, le disque ne compte véritablement que huit compositions dignes de ce nom. Par exemple la bizarrerie “Guitar Sitar”, un instrumental bâclé sur un seul accord noyé dans un flanger. Les bandes devaient probablement tourner lorsque The Arp est sorti se soulager dans les champs. Mais même fumiste, le constat est sans appel : The Pyramids sont la quintescence rock. Franchement, cela faisait une paye que nous n’avions pas pris une telle décharge.

– Leur Myspace