Le collectif originaire du Michigan qui nous promet des samedis qui chantent s’impose avec ce quatrième album, le premier d’une collaboration avec K Records. Et Fill Up The Room d’asseoir définitivement les qualités hors pair de Fred Thomas.


La formation multiforme emmenée par le songwriter et producteur Fred Thomas opère depuis les années 2000 et n’avait, jusqu’à lors, obtenu que la reconnaissance toute relative de ces groupes rompus à la scène : celle, explosive, où fusionnent les styles pour le plus grand plaisir de son public. Ce projet expérimental au line-up indécis a parcouru non moins de quatre studios – dont un à Stockholm et un à Portland – pour accoucher de cet album riche de nouvelles compositions, toutes plus abouties les unes que les autres. Espérons que ce dernier répare l’injuste indifférence dont souffre ce groupe, dont l’inventivité, elle, n’est plus à démontrer.

Car Saturday Looks Good To Me fonctionne un peu comme si l’imagination débordante de son créateur était reliée en permanence à une boîte à idées intarissable. A lui de combiner de façon opportune ces inspirations évanescentes, de faire le tri, le moment venu, entre tel gimmick bien pensé et telle déflagration surprise. Et Fred Thomas est assurément doué en matière de combinatoire, tant ses compositions, pourtant foisonnantes, ont un rendu cohérent.

SLGTM – pour les intimes – sait par ailleurs que les grandes idées n’ont pas forcément besoin de gros moyens. Lui, son truc, c’est plutôt la juxtaposition modeste, la coordination plus ou moins rodée d’instruments qui ont fait leurs preuves chez d’autres professionnels du système D (Andrew Bird en tête) : melodica, glockenspiel, orgue, clavecin.

Quoique… Une fois réunis, comme le fait la liste-fleuve des instruments au dos de leur jaquette, le nombre total des moyens mis en oeuvre, il apparait que Fred Thomas n’a rien d’un compositeur de bouts de chandelles. Et c’est là son atout majeur : il fait intervenir un arsenal d’instruments et au passage une pléïade de musiciens, tout en parvenant à conserver un son authentiquement artisanal. Du tonnerre de saturation qui clôt l’éponyme “Fill Up The Room” aux cliquetis métalliques qui ouvrent “Whitey Hands”, la production, bien que pointilleuse, conserve ce rendu lo-fi. Fort de ce cachet inégalable, SLGTM se fait souvent le vecteur d’une urgence qui nous procure des frissons, comme sur “(Even If You Die In The) Ocean” dont le couplet aurait pu voir le jour dans le cerveau torturé d’un Win Butler d’Arcade Fire. Le groupe partage quelques points communs avec leurs homologues canadiens : de la large palette d’instruments utilisés, aux fantaisies rythmiques qui cassent la monotonie comme cette alternance de cuivres, de batterie ronflante et de choeurs qui composent les délicieuses montagnes russes de “When I Lose My Eyes”, s’achevant finalement sur des riffs vengeurs. Parfois, c’est le piano et son acolyte l’orgue qui viennent en renfort sur des compositions déjà parfaitement ourlées : comme sur les plus lumineuses mesures de “Make A Plan” ou plus candide, sur le thème guilleret de “The Americans”.

De l’enchaînement des pistes de cet album, particulièrement bien pensé, ressort quelques moments de bravoure – “(Even If You Die In The)Ocean” ou “Money In The Afterlife”, calibré pour le tapement fébrile du pied – de belles vignettes nostalgiques – “Hands In The Snow”, chanté par Betty Marie Branes et proche des rêveries d’Isobel Campbell – et des interludes acoustiques – “Peg”, “Come With Your Arms”. En onze pistes, Saturday Looks Good To Me parcourt donc l’éventail, coloré et dense, de son répertoire. Et ce, sans jamais s’enorgueillir d’une quelconque démonstration de force.

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