The Duke Spirit, groupe plutôt prometteur, se noie avec ce deuxième album en voulant créer une tempête dans un verre d’eau. Neptune tombe à l’eau, qui reste sur le bateau ?


Quatre canonniers et une sirène. The Duke Spirit est ce groupe londonien qui avait créé la surprise avec son premier album, Cuts Across The Land (Polydor), en 2005. Pas le carton commercial, mais un succès juste suffisant pour se dire qu’il n’était dû ni au hasard, ni à la conjoncture, et encore moins au joli minois de la chanteuse (encore que). Un bon disque bien frappé, du rock’n’roll sec et sans chichis comme on ne voulait pas nous le présenter à l’époque. Il était en effet préférable de savoir jouer de la beat-machine et porter admirablement le costard pour espérer être baptisé nouveau sauveur du rock par le NME (souvenez-vous, The Kills, Killers, et autres Dead 60’s). Donc, sans le vouloir, l’attitude de The Duke Spirit les différenciait de la masse, leur musique faisait le reste. Un bon vieux garage rock matiné de punk en droite ligne de Detroit (Ann Harbor pour être précis). Et pour un groupe londonien, ce n’était pas la moindre des preuves de finesse.

Ce n’est donc pas sans plaisir que nous les retrouvons sur ce deuxième album qui annonce la couleur avec sa couverture. Justement, les jeunes fougueux aimeraient bien en avoir un bout, de couverture. Première étape, créer son propre label pour être maître de son destin. Deuxième étape, sortir du bois (normal pour un cerf, me direz-vous) et mettre en avant un atout hautement commercial en photo, la jolie Liela Moss (rien à voir avec qui vous savez). Mauvais point, faire appel aux réflexes bassement hormonaux de son public que l’on estime essentiellement masculin n’est pas exactement une bonne idée. Pour preuve, toute la troupe est présente, comme pour signifier que la chasse est gardée (on vous le dit, cette idée n’est pas des plus finaudes). Troisième étape, et ce n’est pas la meilleure nouvelle du jour, se faire entendre en créant la musique ad hoc.

Certes, Neptune n’est pas un disque inintéressant. Gros riffs, grosses guitares, belles mélodies, et toujours ce chant suave et volcanique de la front-woman. Seulement voilà, depuis 2005 le désormais célèbre retour du rock a connu divers évènements, à commencer par une mise en lumière de nombreux représentants des scènes garage de toute une palanquée de pays. Oui, c’est amusant, à lire comme ça, mais les mass medias ont découvert qu’il existait encore un rock brutal joué par des groupes… vivants. Mieux ! Jeunes… Neptune est donc en droit de connaître un destin heureux, mais pour tout vous dire, nous n’y contribuerons pas forcément.

Et bizarrement, The Duke Spirit a décidé d’aller à contre-courant. On a la farouche impression d’entendre, tout au long de ce disque, du Garbage sans synthés. D’ailleurs, on apprendrait que l’horripilant Butch Vig y a mis ses sales pattes qu’on ne serait même pas surpris. Si les compos ne sont pas toutes d’un niveau totalement exceptionnel (on n’en demande pas tant, comprenez bien), elles bénéficient à peu près toutes d’une tenue rock’n’roll bien crasse, et décidément idéalement lustrée par la voix fabuleuse de Miss Moss. On passe à la rigueur sur les ballades mièvres qui parsèment ce disque. Le problème est ailleurs. Pour on ne sait quelle étrange raison, le groupe a décidé de cacher la poussière et la crasse sus-mentionnée par une production présentable – comprenez maousse et clinquante. Excusez-nous, les amis, mais cette idée est franchement dépassée. Il y a bien longtemps que ce son de cathédrale n’impressionne plus personne (à part peut-être les membres du fan club international de Garbage). On serait même tentés de dire que ce son est littéralement has been.

A la rigueur, sur les morceaux vaguement soul, ça passe à peu près, d’autant que les arrangements asséchés font passer la pilule – “Dog Roses”. Mais bon sang, pourquoi ce maquillage vulgaire quand la chanson se suffit à elle-même ? Pourquoi avoir dénaturé “Send a Little Love Token” ou “Into the Fold” sous ce déluge de décibels ? Quoi d’autre que la simple envie de devenir des stars expliquerait un tel grimage ? Si le rêve est louable et somme toute complètement légitime, la voie adoptée pour y accéder est autrement plus discutable. Souhaitons juste qu’il ne s’agisse que d’un coup d’épée dans l’eau et non d’un naufrage annoncé.

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