Echappé de Wolf Parade et libéré de ses chaînes par sa venus (in furs) Alexei Perry, Dan Boeckner nous jette en pâture quelques poignantes diversions electro-rock modernistes.


Après quelques mois de répit, le calendrier des membres de la meute Wolf Parade s’emballe à nouveau : Swan Lake, le super trio dans lequel officie Spencer Krug (avec Dan Bejar et Carey Mercer) sort son second album, synchrone avec celui du couple Dan Boeckner/Alexei Perry, Handsome Furs. Deux projets en aparté mais parallèles, trop tordus chacun pour être de simples side-projects et désormais confrontés ensemble à l’épreuve redoutée du disque de la confirmation. Surtout lorsque les deux cerveaux de Wolf Parade, les activistes chanteurs/compositeurs Krug et Boeckner — sorte d’« Orthros » de l’indie rock, ce chien à deux têtes dans la mythologie grecque — sont issus de l’une des plus brillantes incarnations rock canadienne, responsables d’un premier album, Apologies To The Queen Mary (2005), bien difficile à surpasser malgré des tentatives notables — A Mount Zoomer (2007), ou encore les deux albums de Sunset Rubdown.

Beast Moans (2006), premier album de Swan Lake, ce disque complexe, voire dérangeant, faisait l’étrange effet de bribes de morceaux ou pièces rapportées par chaque membre du trio de leurs groupes originels — Frog Eyes, Destroyer et Wolf Parade. Un détonant amoncellement de mélodies imprévisibles, dérangeantes, limite dadaïstes dans leur approche du collage où manquait seulement un peu de symbiose entre ses instigateurs. La greffe prend mieux sur leur petit dernier, Enemy Mine, disque traversé d’une mélancolie hirsute. A l’inverse, Plage Park (2007) d’Handsome Furs se veut un disque de facture un peu plus accessible, avec des structures rock échevelées, enregistrées dans des conditions minimales — production crue et boîte à rythme omniprésente.

Pour Face Control, le guitariste chanteur Dan Boeckner et son exubérante fiancée Alexei Perry (clavier, touche glam) ont manifestement travaillé d’arrache-pied pour domestiquer leurs mélodies. De tous les disques de la nébuleuse Wolf Parade, ce dernier est certainement le plus brossé. Dan Boeckner s’impose comme le monsieur mélodie de la meute : son chant hoqueté, régulièrement fiévreux, au-delà d’un simple investissement, touche au but sur les exaltés “Legal Tender”, “Evangeline”, “Talking”, ou encore le poignant “Officer of Hearts (It’s Not Me, It’s You)”. Le volume des claviers et pulsations électroniques orchestrés par Alexei Perry monte (“Hotel Arbat Blues”, “Nyet Spasiba”), mais la sale distorsion de guitare de Boeckner râcle et corrompt toutes ces mignonnes sonorités artificielles.

Face Control ne modifiera pas trop la donne établie par le premier jet mais la paufine indéniablement. Certaines des douze compositions accumulées sont sans nul doute supérieures à At Mount Zoomer, deuxième album de la parade du loup. Rien de surprenant si à l’avenir Boeckner faisait de cet engagement une priorité… Handsome Furs ou comment tirer la fourrure à soi.

– A écouter également Swan Lake, Enemy Mine (Jagjaguwar/Differ-ant)

– La page Myspace d’Handsome Furs


Handsome Furs « I’m Confused » from Sarah Marcus on Vimeo.