Il y a des types, comme Julian Casablancas, qu’on adore détester : bien né, belle gueule, réussissant tout ce qu’il touche, apparemment insensible au monde extérieur. Il est même aujourd’hui, allez savoir pourquoi, de bon ton de baver sur The Strokes qui, puisque tous ses membres se lancent un à un dans des projets solo, se déliterait. Ah bon ? Déjà que c’était surfait, alors hein… Oui mais voilà. Petit Un : jamais les principaux intéressés n’ont laissé entendre qu’ils s’étaient séparés, tout au plus faisaient-ils une pause bien méritée après trois disques explosifs — d’ailleurs leur retour en studio est aujourd’hui officiel. Petit Deux : Julian Casablancas se moque royalement de tout ce brouhaha stérile et s’amuse, soit en jouant chez les copains (Dark Night Of The Soul, Queens Of The Stone Age…), soit, à l’instar de ses complices, en enregistrant son album solo à l’arrache, bien campé dans ses marottes à lui. Résultat, ce Phrazes For The Young armé de huit chansons tous claviers 80’s dehors, oscillant entre le kitsch et le glam, le balourd et le n’importe quoi. Enfin, pas complètement. Parce qu’entre ses mains, même d’horribles synthétiseurs font merveille, grâce notamment à son incontestable talent à trousser des tubes à la chaîne et à jouer des rythmes avec une aisance déconcertante. Du coup, Phrazes For The Young, qui n’a d’autre vocation que la récréation réussie, accomplit parfaitement sa mission, accroche du début à la fin, et fait même quelques merveilles quand les guitares, bien strokesiennes elles, entrent en scène, et viennent appuyer ce chant toujours aussi nonchalant, brillamment imbriquées aux pieds des claviers, eux-mêmes langoureusement étalés autour d’une basse martiale — le titre “River of Brakelights” en guise de climax. Pour un résultat excellent du début à la fin, aussi inutile que roublard, aussi superficiel que délirant. Un vrai bon disque de pop en somme. Désormais, en plus des habituels qualificatifs qui suivent son patronyme, devra-t-on ajouter le terme de « génial » à Julian Casablancas, le vrai patron des Strokes.

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– A écouter et regarder, “11th Dimension” :