Feu Jay Reatard et les acolytes du label In The Red s’étaient attelés à rallumer la flamme d’un rock carbonisé et intense. Avec ce second LP, la tâche incombe à The Strange Boys de raviver gaiement les braises d’une musique jouisseuse et vibrante, pas pressée de passer l’arme à gauche !


N’allons pas par quatre chemins. De cette musique-là, on en est ou on n’en est pas. On s’y accroche tout de suite ou bien on passe son tour. Et s’il faut vraiment en dire quelque chose, on tombera d’accord au moins pour admettre que ça ne manque pas de sincérité, ni de conviction. C’est déjà ça ! Oui, oui et puisque nous y sommes, parlons avant toute chose de cette vilaine voix — celle de Ryan Sambol. Braillarde et geignarde au possible. À faire passer Daniel Johnston pour un crooner (juré) ! Elle horripile certes, elle est insupportable, disons le sans ronds de jambes, mais elle colle malgré tout si parfaitement à l’esprit « wok’n’woll » du groupe, qu’on fera semblant de n’y rien trouver à redire.

The Strange Boys from Texas. Rien de vraiment étrange ni d’inconnu pourtant chez ces jeunes blanc-bec, élèves rocker, la six cordes électrisante en bretelle et la foi chevillée au corps (le groupe existe depuis 2001, et ne cesse de tourner) .
De la musique à Papa, rien que l’on ne connaisse déjà. Ils ânonnent tout le répertoire country folk et Nuggets, et ça manque un peu de magie fatalement. Normal, la musique de The Strange Boys est sexagénaire. D’un anachronisme confondant, paumée quelque part dans l’espace-temps. Pourquoi diable, à l’heure d’internet et des réseaux sociaux où tout le monde a tout entendu sur tout, jouer des vieilleries pareilles se demanderait presque le hipster moderne ? Peut-être pour rester dans le coup, tiens donc ! Parce que finalement, à coup sûr, ça ne prendra jamais une ride cette affaire-là. Malin !

Ces types chantent la musique qui vient de là, qui vient du blues. Oh, ils n’ont pas été la chercher bien loin et ils la ressuscitent tranquille, sans trop se fouler, un peu branleurs. Si on ne cherche pas midi à quatorze heures, ça peut même finir par être jouissif. Pas audacieux donc, mais pas frileux non plus. C’est qu’il faut en avoir une sacrée pour rappeler Dylan (trop tard, le nom est lâché) sur tous les titres sans pour autant que ça foute la honte !
Sur ce Be Brave, bien sûr Night Might et l’orgue de Friday in Paris c’est facile et l’exigence fait un peu défaut. Mais ne nous trompons pas de cible. C’est du fait maison, du rafistolé main. Bricolé dans l’obscurité d’un garage à Austin. 100% credibility ! Chez les vieux routards, ça fatiguera beaucoup. Quant aux oreilles plus tendres, elles seront sûrement ravies d’être déflorées par ce groupe, avant de creuser le sillon plus profond et de déterrer un ou deux Dylan (justement) ou le 13th Floor Elevator (Texans également, ça reste en famille), si jamais le coeur leur en dit…

On pourra même pousser un peu plus loin, au moins jusqu’aux défunts Jonathan Fire*Eater (depuis reconvertis sous l’entité The Walkmen). Un groupe malheureux et maudit qui aurait pourtant eu sacrément la côte aujourd’hui. Seulement voilà, ils eurent la mauvaise idée de sortir leur premier album Wolf Songs For Lambs dix années trop tôt. Le titre Be Brave, c’est du pareil au même. On glissera à l’oreille de qui veut l’entendre, que le JF*E c’était même fichtrement bon ! Mais là n’est pas la question. Encore une réhabilitation en bonne et due forme à laquelle il faudra fortement penser, c’est tout. Ne surtout pas se poser trop de questions à l’écoute du présent album. Ça ne va pas plus loin qu’un gigotement confiant de la tête et un sourire en coin. C’est court, efficace, c’est fait pour les kids. Du rock poudreux et râpé aux coudes. Facilement identifiable, instantanément plaisant. Avec leur fort capital sympathie, The Strange Boys est fait pour durer encore des siècles en gardant la même allure. Éternel et inusable. Let’s rock !

– Page Myspace

– En écoute « Be Brave » :