On pourra se gausser longtemps sur les bonnes ou mauvaises raisons d’écouter un nouvel un album des Feelies en 2011. Après tout, il n’ en y a pas de meilleure que son évidente nécessité.


Non, non, rien a changé, tout a continué. Comme une promesse de retour qui, pour les plus patients d’entre nous, assurait de pointer le bout de son nez un un jour ou l’autre, voici enfin qu’un album des Feelies a décidé de fleurir un certain printemps 2011. Vingt ans que l’on attendait ce miracle. Vingt ans qu’on le redoutait également un peu. Pire, on frissonnait à l’idée que le groupe, à force de s’être ainsi si longtemps tenu à l’écart de la lumière, ne se soit asséché et ratatiné, au point de ternir à jamais l’éclat de sa beauté originelle. Ccmme nous avions tort…

Après Time For A Witness sorti en 1991, le tandem Glenn Mercer/Bill Million reprend du service au sein de l’un des groupes les plus exemplaires de ce que l’indie pop a d’enthousiasmant à offrir.
Car, dès les premières notes de « Nobody Knows », on se demande comment nous avons fait pour rester si longtemps amnésiques, à ne pas souffrir chaque jour du manque de cette musique sans âge. Le groupe (re)devient tout à coup, par la magie d’un seul titre, essentiel : le quatuor déploie à nouveau ces trésors de guitares aux lignes claires et tendres, qui vous enserrent fortement, pour vous claquer la bise sur les deux joues et ainsi fêter les retrouvailles.

Car, s’il y a bien un groupe légitime dans l’annonce d’une réapparition tardive, c’est bien The Feelies. Ces vétérans aux racines solides – pensez donc, 35 ans de carrière quasi clandestine – mais à la verdeur toujours intacte, portent avec fierté, comme un étendard, une musique intime et secrète, véritable profession de foi prêchée aux oreilles de tout un pan de l’indie pop, des Strokes à Yo La Tengo. Ces talentueux novices ont bu d’une traite les prophétiques paroles des Feelies. Here Before n’est pas simplement légitime, il est d’une pertinence rare, envoyant valser d’une pichenette la concurrence. Il y a, bien entendu, de la place pour tout le monde dans le royaume de la pop flâneuse, mais The Feelies siège définitivement sur le trône.

Malchanceux de n’avoir jamais su conquérir qu’une arène restreinte d’aficionados — limités en nombre mais fidèles en amour — Here Before viendra réparer cette injustice, s’ajoutant à la liste de leurs albums qu’il faut absolument posséder. Autant dire les cinq, Crazy Rythms, The Good Earth, Only Life et même Time for a Witness.

Avec cette façon chevaleresque de faire bruisser la timidité, le rock nerveux et câlin du groupe d’Haledon resplendit au profit de mélodies qui batifolent comme au bon vieux temps – ce binoclard de Glenn Mercer sait toujours comme personne à quelle place se trouve notre cœur d’artichaut, pour le faire ainsi galoper à vivre allure.
Le nouvel album du groupe égraine des titres d’une grande qualité qui, loin d’être des fonds de tiroir pour œuvres à but lucratif, sont, au même titre que le reste de leur discographie, d’une importance capitale. Capitale du moins pour la poignée d’amoureux transis, qui leur sont à jamais reconnaissants d’avoir su, par leur présence discrète mais ô combien fondamentale, éclairer leur chemin. The Feelies, déjà là avant, pendant et sans nul doute encore très longtemps après.

– Site officiel

À écouter: « Nobody Knows »