Fidèle à sa vieille six-cordes, le folksinger suédois n’en continue pas moins de grandir sur son troisième album, There’s no Leaving Now. Une tête au-dessus de la concurrence.


Depuis sa campagne suédoise du Leksand, le troubadour solitaire Kristian Matsson, alias The Tallest Man on Earth, nous adresse dix nouvelles correspondances intimistes, guitare en bandoulière. Son troisième album est aussi le plus sédentaire à ce jour. Alors que précédemment, dans ses chansons, il était toujours sur le départ ou ailleurs par monts et par vaux, There’s no Leaving Now raconte l’histoire d’un voyageur enfin posé. Il était temps de rentrer après avoir sillonné le monde. Un retour aux sources vital après les tournées interminables qui se sont enchaînées depuis deux ans. L’an dernier, le formidable EP Sometimes the Blues is Just a Passing Bird montrait à quel point cette jeune force de la nature maîtrisait son canevas folk et ce souffle frissonnant qui émanait de son organe dylanien. There’s no Leaving Now poursuit cette idéal. Comme toujours, sa musique dépouillée jusqu’à l’os se nourrit de subtiles nuances, rythmées d’arpèges à la dextérité fiévreuse, et de la puissance exclamatoire de sa voix, capable de faire trembler les murs, qui vous happe dès les premiers mots. Si l’écrin folk austère est toujours le même, l’émotion est d’une justesse incomparable : l’immense « Wind & Walls », « 1904 » ou encore bouleversant au piano sur la chanson qui donne son titre à l’album. Rien n’est le fruit du hasard chez The Tallest Man on Earth et ce dernier opus en est la preuve éclatante. Élémentaire, Mr Mattson.

Pinkushion: There’s No Leaving Now est votre troisième album. Où avez-vous puisé l’inspiration pour écrire ces nouvelles chansons et les paroles?

Kristian Matsson : Et bien tout cela est un peu une obsession personnelle. J’ai toujours écrit des chansons ayant pour thème la fugue, mais maintenant j’ai enfin réussi à écrire et enregistrer dix chansons sur l’envie de rester, pour finalement faire face à nos faiblesses et à nos peurs. Le dernier album avant cela, The Wild Hunt, a été enregistré au cours d’une période très chaotique de ma vie, mais beaucoup de choses se sont passées depuis, et maintenant je me suis trouvé un endroit où je me sens bien, avec tellement de bonnes choses autour de moi pour lesquelles je ne peux être que reconnaissant, ainsi que les gens que j’aime. Cet album devait être personnel.

Le son de l’album est toujours joliment chaud, lo-fi dans son traitement. Beaucoup de musiciens folk lo-fi essayent d’enregistrer leur deuxième album ou troisième dans un grand studio, chose qui ne semble pas encore vous intéresser. Merci de résister ! Pensez-vous que l’enregistrement dans un studio grand et confortable est une erreur pour le moment ?

Je vous remercie, et non je ne dirais pas que c’est une erreur en général. Tant de grands albums ont été enregistrés dans des studios professionnels, mais j’avais besoin du confort de mon propre studio, être à la maison pendant un certain temps. J’avais besoin d’être en mesure de travailler à partir du moment où je me réveille jusqu’au moment où je tombe de sommeil. J’ai travaillé sur tellement de chansons en même temps. Un chaos, mais un bon chaos.

Pensez-vous jouer ou enregistrer avec un groupe dans le futur?

Bien sûr, mais je ne fais pas vraiment des plans à long terme avec ma musique en ce moment. Je vais simplement commencer à tourner en solo et voir comment ça se passe.

Vous avez la réputation d’être un grand performer solo sur scène. Y a-t-il des concerts d’artistes-interprètes qui ont changé votre vie?

Chaque spectacle de Bon Iver auquel j’ai assisté a certainement fait de moi une autre personne, meilleure. Bien meilleure.

The Tallest Man on Earth, Kristian Mattson, Paris, mai 2012

On mentionne toujours Dylan à l’évocation de votre musique. Est-ce que cela vous ennuie ?

Non, ce sont uniquement des journalistes qui me le disent en face, et ils peuvent dire toutes sortes de choses. Donc je vais très bien, vraiment. Question suivante?

La guitare folk est au centre de vos chansons, mais on entend d’autres subtils éléments dans There’s no Leaving Now. Une deuxième guitare rythmique ou une lapsteel, un piano. Toutefois, la batterie ne vous manquerait-elle pas parfois ?

Parfois oui, mais il y a de la batterie partout dans ce disque. Elle est juste un peu cachée, mélangée avec d’autres choses.

Pouvez-vous donner vos cinq albums préférés ?

Emma, Forever Ago – Bon Iver

Wrecking Ball – Emmylou Harris

The Greatest – Cat Power

Sometime, I wish we were an Eagle – Bill Callahan

S/T – Bon Iver

Un lieu ?

Eh bien j’aime où je vis en ce moment, dans la campagne en Suède, il y a la rivière avec ses rapides à seulement 200 mètres, et les bois sont de l’autre côté. Aussi souvent que j’ai le temps, je pars en randonnée et je pêche à la mouche. C’est un trésor fabuleux que d’avoir ce lieu, et un grand contraste avec les autres choses que je fais.

The Tallest man on earth, There’s no leaving Now (Dead Oceans /Differ-ant – 2012)

The Tallest Man on Earth, Kristian Mattson, Paris, mai 2012

En écoute, The Tallest Man On Earth – « 1904 »





English Version

Pinkushion : There’s No Leaving Now is your third album. Where did you find the inspiration to write these new songs and lyrics ?

Well the whole thing is a bit self obsessed really. I’ve always written songs about running away, but now I finally managed
To write and record 10 songs about wanting to stay, to finally deal with your own weaknesses and fears. the last album before this,
the wild hunt, was recorded during a really chaotic time in my life, but a lot of stuff has happened since, and now I found myself
in a really great place, with so many things around me to be greatful for, people that I love. This album needed to be personal .

The sound of the album is still beautifuly warm, lo-fi in the treatment. Many lo-fi folk musicians try to record their second or third album in a big studio, but you didn’t. Thanks for resisting! Do you think recording in a comfortable big studio is a mistake?

Thank you, and no I wouldn’t say thats a mistake in general, so many great albums have been recorded in big studios, but I needed the comfort of my own studio, to be home for a while. I needed to be able to work from when I woke up to when I fell asleep.
I worked on so many songs at the same time, a chaos, but good chaos

Still, do you sometimes think about playing or recording with a band in the futur?

For sure i do, but i dont really do long term plans with my music right now, im going to start of touring just solo and see how that goes,

You have the reputation of being a great solo performer. Are there any concerts of other artist- performers that have changed your life?

Every Bon Iver show I’ve ever seen has for sure made me another person, for the better. Very much better.

People always mention Dylan when they talk about your music. Does it annoy you?

No, it’s only journalists that tell it to my face, and they can say all sorts of stuff, so I’m fine really. Next question?

Guitar folk is at the center of your songs, but we can hear new elements in There’s no leaving. A second rythmic guitar or a lapsteel sometimes, for exemple. Do you miss drums?

Sometimes I do, and its drums all over the record. They’re just a bit hidden, blended with other stuff.

Can you tell me your five favorite albums of all the time?

For emma, forever ago ­– Bon Iver

Wrecking ballEmmylou harris

The greatest Cat Power

Sometimes I wish we where an eagle Bill Callahan

Bon Iver Bon Iver

A place?

Well i love it where I live right now, in countryside sweden, I have the river with its rapids just 200 meters away, and the woods on the other side. As often as I have the time to, I go hiking and flyfishing,
That’s an amazing treasure to have, and great contrast to the other stuff I do.