Notre compte-rendu de la journée du 25 mai, avec Von Pariahs, Concrete Knives, Brns, Sexy Sushi, Villagers, et la tête d’affiche de cette soirée, Amon Tobim.


C’est armé de nos après-skis, parka, gants, polaire, thermos, chiens de traîneaux, bottes et ciré jaune que je suis allé couvrir la soirée du samedi 25 novembre 2013.
Affiche fort alléchante pour ce samedi. Outre Concrete Knives, Sexy Sushi ou Villagers, la tête d’affiche de cette soirée, Amon Tobim, quand même, ferait devenir priapique n’importe quelle Boutin Mormonique.
Mais là n’est pas mon propos, arrêtons les digressions et revenons donc au festival en lui même. Le site des 3 éléphants se présente en deux scènes : une sous chapiteau (le patio) l’autre dans une salle (l’arène) et une cour sur le côté où se trouvent la plupart des stands pour se sustenter et boire jusqu’à la lie. Simple. Au niveau de l’acoustique, rien à redire, son excellent et puissant. Le cadre posé, passons aux concerts.

Concrete Knives



C’est sous un ciel malgré tout clément que Von Pariahs inaugure cette soirée de samedi. Devant un parterre d’une quarantaine de personnes, le groupe Nantais ne se laisse pas démonter, loin de là. Il propose une mixture tout à fait digeste de Joy Division et des Stooges, le tout mené par un chanteur au charisme étrange, mélange surréaliste de Bez, Shaun Ryder et Ian Curtis pour la danse. Très bon concert dans l’ensemble, bien énergique. Seul point noir : une tendance à l’embonpoint avec des dérives très U2esque quand les Von Pariahs changent le braquet de direction Stooges/Joy Division.
Fin du concert sous le patio, direction l’arène pour voir The Villagers. La salle se remplit doucement, la foule arrive presque sur la pointe des pieds pour ne pas déranger, un peu à l’image de ce concert. Groupe pop gentil, sympa, propret proposant une pop très anglaise allant de Prefab Sprout à Coldplay voire Radiohead. Agréable mais loin d’être inoubliable. Disons que pour ceux qui aiment les groupes pré-cités, le concert est formidable.

Retour sous le patio pour Brns. Groupe Belge que je ne connais ni Dave ni d’Adam. C’est donc vierge de tous préjugés que j’arrive en plein milieu du premier morceau. Je découvre sur scène un quatuor formé de façon étrange : batterie, clavier et percussions collés les uns aux autres formant un quart de cercle sur la droite et le guitariste, se promenant ça et là sur la scène à sa guise. Sont bizarres ces Belges me dis-je en moi même. Passé le premier morceau sur lequel j’ai du mal à accrocher (des restes du concert précédent peut-être ?), les choses sérieuses commencent. Le groupe prend ses marques et commence à déployer une énergie hors du commun. Le batteur/chanteur massacre ses fûts en s’égosillant, le claviériste/bassiste fait sonner ses claviers comme dans les années 60, sous grosse influence Silver Apples, l’autre claviériste/percussionniste fait de même et enfin le guitariste se contrefout des arpèges, des grilles d’accord et n’utilise sa guitare que dans un but expérimental, la partie haute du manche lui étant inconnue, lui préférant le chevalet. Pendant quarante minutes, c’est proprement ascentionnel : pas une baisse de rythme, ça part littéralement dans tous les sens, c’est fou, hypnotique et parfaitement maîtrisé.
Sur le livret des 3 éléphants, le groupe est associé à Foals ou Dan Beacon. Sur disque en effet, le son est polissé, plus pop. Sur scène en revanche, c’est Can, Silver Apples ou, plus près de nous, les Liars que le groupe évoque. Au bout de trois morceaux, le groupe a mis la foule dans sa poche et se permet même avec « Mexico » un hymne que n’importe quel quidam peut reprendre à tue-tête. Ce que le public ne fera pas mais sur lequel en revanche il dansera comme des puces excitées. Grosse ovation de la part de celui-ci à la fin du concert et grosse mais alors grosse claque pour ma part. Le meilleur concert de ce samedi, ni plus, ni moins.

Le groupe Belge Brns



Retour de nouveau à l’arène pour The Lightning 3 : j’arrive sur un « I want your sex » repris façon Soul. C’est carré, propre, bien fait mais ça manque de folie. Vous me direz, juste après la claque Brns, pas étonnant que je trouve ça un peu froid. Je fais donc l’impasse préférant aller me sustenter et me réserver pour le concert suivant, à savoir Sexy Sushi.
Alors, comment dire ????
J’arrive dix minutes en avance au moins au troisième rang sous le chapiteau. Prêt à dégainer mon appareil photo. D’un coup, sans rien comprendre, je me vois entouré d’une horde d’adolescents aussi acnéiques qu’hystériques commençant à hurler le nom de Sexy Sushi dans mes pauvres et frêles conduits auditifs qui n’en demandaient pas tant. Non mon pauvre ami, tu n’es pas victime d’un flashback, ce n’est pas Patrick Bruel que tu vas aller voir mais ça s’en rapproche hystériquement parlant. Le groupe finit par arriver sur scène, la foule s’embrase et c’est parti pour trois quart d’heure de folie, de stage-diving, de délires au vingt cinquième degré voir au-delà. Parce que Sexy Sushi sait utiliser à son avantage la provocation choc et toc : un des membres du groupe, à l’ossature lourde dirons-nous, apparaît sur scène torse nu et velu, masqué comme la crampe de Pulp Fiction et permet à la chanteuse d’assouvir quelques délires sado-maso avec lui. Cette même crampe utilisera plus tard une meuleuse pour faire des jets d’étincelles au rythme de la musique sur un barrière mise à sa disposition. Le groupe sur un des morceaux fait monter sur scène des personnes du public et les laisse danser en soutif (pour les dames) et torse nu pour les autres. Il se permet entre autre de jeter des pots de fleurs dans la foule, des baguettes de pain, des pains de trois livres, de faire de la provoc’ à deux balles à propos de Justice avec une croix géante en polystyrène jetée dans la fosse ( « Bonjour nous c’est Justice, ou plutôt….. injustice.« ) ou des allusions sexuelles dignes d’une libertine de Mylène Farmer. C’est du grand-guignol tout à fait assumé et très drôle au trentième degré. En revanche niveau musique faut aimer l’électroclash et la rebellion adolescente. Imaginez vous David Guetta ayant écouté les Béruriers Noirs et se prenant pour Billy Ze Kick le tout sous haute influence eighties. Pas tout à fait ma tasse de thé comme vous l’avez compris. Pas grave, le show a été assuré, les kids venus spécialement pour eux ravis et tout le monde semble content sauf les vieux grincheux.

Sexy Sushi


Retour à l’arène pour Concrete Knives et là, seconde claque. Différente de Brns mais claque tout de même de la part du groupe Caennais. Le concert de Sexy Sushi ayant débordé, j’arrive un peu en retard pour les Concrete et vois une foule en délire danser comme un seul homme sur une musique simple d’accroche et immédiate. Une pop-rock aux rythmes africanisants, d’une grande fraîcheur. Le groupe semble à l’aise, d’une grande cohésion et leur chanteuse, Morgane Colas, grand et charmant filet filiforme limite androgyne, dispose d’une présence scénique remarquable. Concrete Knives enchaîne les morceaux pop façon Papas Fritas, rock à fond de cale, sans le moindre temps mort, fait une allusion en début de set aux Von Pariahs puis les invite à foutre le bordel sur l’avant dernier morceau du concert.Tout ça se fait dans une bonne humeur plus que communicative : ça déconne autant sur scène entre guitaristes et bassiste notamment que dans la foule qui en profite pour débrailler Morgane lors d’un stage diving mémorable. Le claviériste abandonne ses claviers, harangue le public et le fait participer sur chaque morceau. Bref c’est un foutoir fort sympathique, dansant, massif et carré au niveau des compos. Une belle surprise me concernant.

J’en ressors le sourire béat aux lèvres, prêt à en découdre avec le groupe suivant, à savoir JC Satan, auteurs d’un set relativement court mais intense. Très intense. Groupe Bordelais, les JC Satan sont quatre sur scène : deux femmes, deux hommes, une quarantaine d’années chacun au compteur et une Gretsch faisant un barouf monstrueux. Pour faire court, imaginez Sugar se mettant au garage-rock et vous aurez une idée de la puissance d’action du groupe. Ca dépote velu, c’est sec comme coup de trique, joué sur des instrus vintage (le clavier semblait sorti de l’an 50 avant JC), le chanteur/guitariste dispose d’une présence scénique et d’une énergie plutôt communicative. C’est bien simple, à cinq mètres de la scène vous deveniez au mieux sourd au pire vous vous retrouviez avec les oreilles liquéfiées et défiguré à vie. Pour résumer, si vous vouliez profiter au mieux du concert, l’accès à l’arène, une trentaine e mètres plus loin, était indispensable.

JC Satan


C’est donc les oreilles vrillées que je rejoins Amon Tobin à l’arène pour ce qui sera le dernier concert de la soirée me concernant. Je ferai simple : grand moment. DJ set d’une heure presque et demie, Tobin, caché derrière ses ordinateurs, est un sculpteur de son sachant parfaitement prendre la température de son public, alternant puissance de feu et calme relatif. Sa techno savante vous transporte, vous permet de vous abandonner, lâcher prise, laisser libre cours non pas à vos pensées mais à vos jambes qui ne se souvenaient plus qu’elles pouvaient autant remuer indépendamment du cerveau. Au bout d’une heure de techno pure et dure, le Brésilien se lève de son siège, compte les survivants, fait comprendre que la fête ne va pas tarder à s’arrêter et enchaîne sur son projet two fingers pendant une vingtaine de minutes. Le set se termine, Tobin se lève une dernière fois, remercie le public, exsangue, et s’en va comme si de rien était.

J’en profite pour faire le bilan, juste avant de quitter l’arène, me disant que décidément ce festival, au moins pour ses concerts, sait allier programmation exigeante et grand public, découvertes et confirmations. Le tout à taille humaine, dans une ambiance bon enfant.

Rendez-vous, je l’espère, l’an prochain pour d’autres découvertes.