Découverts par le label de Chicago Trouble In Mind Records, The Limiñanas nous gratifient d’une nouvelle galette Psyché-Chic made in France. Enfin le temps de la reconnaissance sur leurs propres terres?


C’est un joli pied de nez: The Limiñanas, duo sur scène et dans la vie originaire de Perpignan et composé de Marie (batterie/ chant) et Lionel (multi-instrumentiste) Limiñana, sont parvenus avec Crystal Anis (2012), leur second opus, à faire entrer le Yéyé à la Française dans le Summer Of Love Californien… et c’est ainsi que ces Français sont devenus les chouchous d’une certaine Amérique nostalgique, tombée sous le charme de cette pop psyché-chic avec ce côté si frenchie emprunté avec brio aux meilleurs mélodies d’un Gainsbourg à son apogée, période « initiales BB ». Signés chez Trouble in Mind Records (Ty Segall, Jacco Gardner, Mikal Cronin…), The Limiñanas ont vécu leur rêve américain en parcourant les Etats-Unis de clubs en clubs en cette période de fièvre vintage, et ont même composé pour la marque Kooples et pour la série Gossip Girl: bref, ils ont le vent en poupe et, des paroles aux sonorités, voire aux visuels, tout semble avoir été sortit d’un carton poussiéreux planqué dans une cave depuis la fin des années 60. Voir à ce sujet l’excellente vidéo de « Je ne suis pas très drogue », morceau terriblement swingant et trippant, à tel point que son titre parait inévitablement ironique.

« Costa Blanca », sorti ce mois ci, suscitait donc une certaine attente, et pourrait enfin leur faire accéder à une reconnaissance méritée sur leurs propres terres. Plus éclectiques, ces 13 offrandes gardent pour autant une grande cohérence de style, avec ce mimétisme au phrasé du beau Serge (on le croirait réssusciter sur les premières paroles de « Je me souviens comme si j’y étais »), littéralement teinté de psychédélisme et de ce côté désinvolte rappelant immédiatement le Velvet Underground (« la Mélancolie »). Ce choix pour un second album d’avoir précieusement conservé cette couleur musicale qui les à fait connaitre est d’autant plus appréciable qu’ils ne se sont pas contentés de récréer leur premier effort, ils l’ont sublimé et agrémenté d’une touche méditérranéene – orientale avec l’utilisation de tambourins et cithare entre autres, qui se traduisent parfaitement dans les titres et les sonorités de certaines chansons (« I miei occhi sono i tuoi occhi » ou « Alicante »).

Moins influencés par le Yéyé que par les bandes originales de films qui sévissaient à la même époque selon leurs dires, The Limiñanas citent volontiers Ennio Morricone sur « Votre Côté Yéyé m’emmerde », mais pas que… Ils se lancent vaillamment sur ce morceau dans un exercice de name-dropping en énumérant simplement ce qui les fait vraiment vibrer, comme pour nous mettre nous, petits chroniqueurs, sur la bonne voie en terme d’influences (beaux joueurs, citons pêle-mêle « Jean Luc Godard », « Eric Rhomer », « Kim Fowley », « les coups de fuzz », « Memphis »…merci!). Car ce très créatif et indépendant duo (en studio seulement, The Limiñanas étant six sur scène) à l’art sans pareil lorsqu’il sagit de mêler musique cinématographique et sonorités psychédéliques – tempo primitif, voix dictée, paroles rétro-déglingo et fuzz à gogo – pour accoucher de petites merveilles comme le tube un peu sombre « My Black Sabbath », la bien nommée « La Mélancolie », voire l’escapade en plein désert sous amphétamines « La Mercedes De Couleur Gris Métallisé ».

Cette belle virée dans le temps en noir et blanc s’achève avec la très annonciatrice « Liverpool »… On ne saura pas si ils ont rencontré la petite Marion dont il est ici question lors de leur voyage vers la ville des Fab Four, mais c’est bien à l’International Psychelic Festival de Liverpool qu’ils se produiront prochainement en concert. Et qui sait, peut-être est-ce le début d’une reconnaissance sur le vieux continent, à l’heure de ce solide troisième album.