Tâche ardue pour le chroniqueur que de mettre des mots sur une Å“uvre si dense, indescriptible.


Tâche ardue pour le chroniqueur que de mettre des mots sur une Å“uvre si dense, indescriptible. Qu’on ne se méprenne pas, ce disque est tout à l’honneur de Les Marquises, en ces temps où l’on nous rabâche que la musique tend vers l’uniformisation. Risquons-nous de tenter de transmettre par l’écrit cette passionnante expédition sonore et sensorielle. Pensée Magique donc, bouillonnant deuxième album de Les Marquises, est la vision du stakhanoviste Jean-Sébastien Nouveau au sein de son collectif basé à Lyon – ont participé notamment à cette aventure Etienne Jaumet (The Married Monk, Zombie Zombie), Nicolas Laureau (Don Nino, NFL3), Martin Duru (Immune, Colo Colo), Jonathan Grandcollot (Maman Brigitte, Plein Soleil) et Benoit Burello (Bed). Quand on vous parle d’expédition, le mot est justement pesé. Son géniteur dit avoir été inspiré par les films amazoniens de Werner Herzog avec Klaus Kinski (Aguirre et Fitzecarraldo) et de Peter Brook (Sa majesté des mouches), soit des films où l’humanité se retrouve confrontée – jusqu’à ses retranchements – à un milieu naturel hostile. On se permet de rajouter personnellement L’Exorciste 2 de John Boorman avec l’incroyable BO d’ Ennio Morricone, pour le côté sorcellerie et le rituel obsédant des percussions.
Pensée magique est avant tout un disque pop hors cadre, foisonnant, tribale, affranchi de toutes les règles en vigueur à l’exception d’une seule : celui soucieux de rentrer dans le format court d’une chanson. On pourrait ainsi évoquer sur « Cassette » la rencontre improbable de Robert Wiatt et Throbbing Gristle, frémir à l’écoute de l’atmosphère tendue et oppressante de « Chasing The Hunter » et ses rythmes cannibales aliénants… pour terminer sur un semblant d’apaisement avec « Jenny’s Magic », que n’aurait pas renié le Thom Yorke épileptique d’Amnesiac. On ignore comment procède Les Marquises pour mettre bout à bout tous cette impressionnante somme de collages. Certainement le fruit d’un travail minutieux, d’une patience à toute épreuve dans l’unique dessein de provoquer des accidents heureux. Quelque chose nous échappe toujours sur Pensée Magique, et c’est pourquoi on peut y revenir indéfiniment. Le mystère reste entier. Voilà le grand bol d’air de ce début d’année que nous attendions.

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