Cinq ans après A ship, like a ghost, like a cell, le discret Thomas Mery publie son second album Les couleurs, les ombres, nouveau recueil chanté en français.


Cinq ans après A ship, like a ghost, like a cell, le discret Thomas Mery publie son second album Les couleurs, les ombres, nouveau recueil chanté en français. Épure folk soigneusement ourlée de textures electronica, A ship, like a ghost, like a cell (2006), offrait à entendre une mue en solitaire, élégamment accomplie. Pour le dire simplement, le charme s’installait. Aujourd’hui, pour l’ex membre de la formation post-rock Purr, le choix de délaisser l’anglais pour le français (évolution déjà esquissée sur trois titres parus en février 2010) ferme quelques frontières, mais éclaircit L’horizon. Et pourtant, Thomas Mery a plus que jamais berné les douanes avec sa musique, qui flotte au-dessus des lignes de démarcation. D’emblée, ses mots, comme libérés, accroissent l’introspection, nous haranguent sur « Du sirop » – « j’observais les lignes brisées les fractures les lignes qui se croisaient ». Avec ce vague à l’âme un peu distant qui n’appartient qu’à lui, Thomas Mery se meut parfaitement dans l’espace, et la subtilité de la langue opère les « étroites liaisons » entre la poésie d’un Nick Drake et un certain Dominique A, figure hexagonale incontournable. Mais son goût assuré pour les correspondances entre rock, folk et jazz, se charge de transporter son élégant phrasé ailleurs que dans des niches musicales. Sur les arrangements feutrés, sans faux-mouvement, élaborés avec Stéphane Bouvier (Yann Tiersen) et Jérôme Lorichon (The Berg Sans Nipple), ses arpèges si singuliers qu’on ne parvient pas vraiment à les cerner, vaquent de l’acoustique à la fée électrique, ses inflexions vocales se chargeant de remarquablement ponctuer le rythme, au-delà de la prose. On aime le superbe « En silence », soufflant des volutes hispanisantes, l’automnale « Où de la pluie », vernie d’un hautbois… « Aux fenêtres immenses », échappée de dix minutes, frise les contours post-rock de Gastr del Sol, voire de Mark Hollis. D’ailleurs, de ses vieilles influences, Thomas Mery retrouve l’anglais le temps d’un couplet sur deux morceaux, dont « Ça », comme pour pigmenter le tableau de quelques touches de couleurs, d’ombres… Les mots ne sont plus les mêmes mais le message a gagné en précision. Un nouveau chapitre s’ouvre, riche des acquis du passé.


Crédits photo : Shane Aspegren