Déstructuré et claquant, ce combo à guitare existentialiste déploît la puissance de Wire couplée à des harmonies a capella de Kate Bush et la classe de The Jam. Jubilatoire.


Avec la ribambelle de disques rock Anglais qui nous tombent dessus en ce moment, on va oser vous refaire le coup du groupe tendance brit-post-punk. On sent déjà votre mâchoire s’ouvrir inconsidérément révélant un bâillement effrayant, mais on va tout de même vous parler de The Futureheads. Car ces lascars-là ont l’air plus malin que le reste du peloton de tête (d’autant plus que cet opus nous a filé entre les doigts puisque toujours pas distribué en France; sorti fin mai en Belgique). Originaire du pays où l’on roule à droite, les Futureheads sont tout de même parvenus à s’exporter aux Etats-Unis où ils tournent régulièrement sur les routes avec une audience soutenue. Ce premier album sorti l’année dernière vient d’être luxueusement réédité (en import anglais) avec un bonus dvd contenant clips et extraits live).

Produit en partie par Andy Gill de Gang of Four, The Futureheads laisse échapper quelques résonances désordonnées d’un Fugazi, le stylisme de The Jam et les harmonies aeriennes d’une Kate Bush. Quatuor électrique par excellence (deux guitares, une basse, batterie) ces tronches futuristes ne semblent pas porter beaucoup d’intérêt pour les schémas conventionnels de composition inhérents à la pop(refrain/couplet/pont/couplet/finale).

Chaque morceau est scrupuleusement désossé et remonté sans notice. Hormis leur reprise étourdissante d’un standard de Kate Bush, “Hounds of Love”, vous comprendrez que les Futureheads sont moins faciles d’approche qu’un Bloc Party ou Franz Ferdinand. En cassant le moule pop, le groupe s’est exempté de tout diktat musical et déploie une pléthore de trouvailles mélodiques éblouissantes. Un titre comme “Meantime”, par exemple, comporte autant de trouvailles qu’un album entier de Razorlight, sérieusement.

Mais ce n’est pas tout, les Futureheads disposent d’un seconde arme, un piment qui fait considérablement monter la sauce : l’usage sans vergogne de vocaux a capella sur leurs brûlots post-punk. « Rien de plus ringard que des choeurs à capella ! » me répond Sid écroulé dans une bouche d’égout. Mouais. Attendez d’entendre ce qu’ils parviennent à en tirer et vous allez sérieusement réviser votre jugement. “Carnival Kids” parvient à un équilibre magnifique entre guitares brouillonnes et choeurs (oh oh oh) divins.

Les morceaux placés en avant du disque sont les plus accrocheurs. “Le garage” (en français siou plait, mais imperceptible à l’écoute) contient quelques guitares rêches et puissantes dignes de Wire. “Robot” débute avec un riff rappelant le “Banquet” de Bloc Party, puis s’habille d’une esthétique « Mods » à la The Jam proprement irrésistible. Malin comme des hyènes, les Futureheads sont des ciseleurs de riffs redoutables (“The City Is Here For You To Use” ou le très ironique “First Day”), portés par une rythmique toujours soutenue, serrés comme des vis. Ils ont accouché d’un riff monumental sur “Decents Days and Night” qui concourt sans tour de qualif’ à l’un des meilleurs hymne rock de ses six derniers mois. Plus épuré, “Danger Of The Water”, avec ses a capella en canon, nous arrache quelques frissons de sensibilité.

Là où une ou deux écoutes suffisent pour avoir fait le tour des derniers groupes anglais en date, ce quatuor réveille miraculeusement notre flamme rock et nous réserve encore de belles montées de fièvre. Plus qu’un investissement, ce début flamboyant est un placement à taux explosif.

-Le site officiel de The Futureheads