Un penchant pour les pochettes verdoyantes et un mimétisme vers l’acid folk des anciens de Fairport et Pentangle, revisité par une production actualisée. Une sympathique promenade champêtre.
Un album de jeunes talents présentant le logo d’Hannibal Records, mythique label du non moins légendaire producteur Joe Boyd, cela en jette mine de rien. Parce que même si l’enseigne britannique ne sort plus que des disques pépères de vétérans, une nouvelle signature est tellement rare qu’elle intrigue forcément. L’enseigne a tout de même signé et réédité la crème des folksingers outre-Manche, de Nick Drake en passant par Richard Thompson, John Martyn sans oublier quelques têtes chercheuses non identifiées telles que Brian Eno, Robert Wyatt et John Cale.
Leur dernière progéniture s’appelle The Eighteenth Day Of May (The May, pour les intimes) et officie dans un folk/rock psychédélique fortement influencé par les cadors Fairport Convention et Pentangle. Revigorants, The May pourrait bien remettre en selle cette bonne vieille adresse londonienne laissée un peu à l’abandon et dont tant de jeunes pouces « in » se revendiquent désormais (Devendra Banhart en tête). Voyons cela comme un juste retour des choses car après tout depuis son émergence dans les années 80 Hannibal Records est pratiquement considéré comme une marque déposée du genre folk.
Constitué de musiciens trentenaires, le groupe a démarré en trio en 2003, (comme le Incredible String Band) devenu l’année suivante un sextet (comme Fairport Convention). Sans véritable surprise, leur line-up est calqué sur celui des illustres maîtres : Dans le rôle de Sandy Denny à la flûte et au chant, Alison Brice. Si la belle n’a pas le coffre de Miss Denny, son teint vocal clair apporte indéniablement de beaux attributs à l’ensemble. Le suédois Richard (Thompson?) Olson (guitare, harmonica, sitar) et le joueur de mandoline/guitariste Ben Phillipson constituent la paire de médiators ancestrale. Petit défaut d’impression esthétique, Alison Cotton au violon est un peu plus agréable au regard que le vieux barbu Dave Swarbrick…
Sans trop bousculer les conventions inhérentes au genre, The Eighteenth Day Of May assume et digère parfaitement ses affiliations de génération. Ce baptême de feu (de camp) bénéficie d’une mise à plat sonique remarquable, et c’est certainement ce qui donne une réelle dimension à la chose. Les main(ette)s revigorantes d’Andy Dragazis (le trio pop psychelectron Blue States) et dans une moindre mesure Bill Doss et Patrick Erchick (ancien clowns cinglés d’Olivia Tremor Control) peuvent être chaleureusement remerciées sur les crédits. Au vu de leurs précédents artistiques, on ne s’étonnera pas de l’emploi de bandes de pillules dopantes, prescriptes déjà chez Spacemen 3. Les doses d’acide sont légères, le trip ne vire jamais au cauchemar. Pour constater le travail de dépoussiérage, il suffit d’aller sur la plage 4, une reprise de Bert Jansch (“Deed i Do”) ou les entendre rafistoler un vieux air traditionnel (« Lady Margaret ») pour qu’ils sonne comme interprété par un Fairport Convention dont le Mojo aurait été téléporté en 2006, son céleste en prime. Il en est de même pour « Eighteen Days » qui au départ parait anodin, calqué sans vergogne sur Liege & Relief : rayons ensoleillés de guitares douze-cordes, tambourin et chantonnement. Ce n’est qu’à mi-parcours que l’on parvient à s’extirper de leur exploration baba cool, réveillé par un brillant décollage de la paire basse/batterie. C’est parti pour le voyage : prairie verdoyante, nattes longues, sabots et robe à fleur… la caravane des Ingalls passe.
Plutôt doué pour les mélodies caressantes et sensibles, The May cultive une belle portée de chansons florissantes (“Sir Casey Jones”, “Cold Early Morning”, “Highest Tree”), toujours caressées par un dulcimer chatoyant.
Sans chambouler quoi que ce soit, The Eighteenth Day Of May est un disque d’acid folk gentillet, peut-être un peu trop parfois… Ils écument actuellement les scènes d’outre-Manche aux côtés du génial excentrique Robyn Hitchcock. Le grain de folie de l’ex Soft Boys devrait faire des merveilles en leur compagnie.
-Le site officiel
– On écoute deux morceaux sur myspace