Les initiés le savent, le Rock se porte bien au pays d’Ulysse. Les nouveaux venus de Holy Monitor se proposent de mener la barque, façon Space-Kraut. Du haut niveau.


Alors que les parties de cartes s’éternisent aux terrasses des cafés d’Athènes, et que les jeunes branchés lézardent sur les plages privées de la belle Hydra, d’autres écument sans relâche les clubs décrépis des sous-sol de la capitale Hellène, que ce soit pour noyer leur auditoire dans une reverb de fuzz hypnotique (Acid Baby Jesus), arborer fièrement un Stoner Rock des plus lourds (1000mods), ou singer magnifiquement la période glam de Ty Segall (Whereswilder). Bref, la Grèce ne produit pas que de la dette et de l’ouzo, non. Le pays de Nana Mouskouri et du Syrtaki, malgré la crise, irradie encore d’ondes psychés jadis envoyées par Aphrodite’s Child à sa grande époque (celle de « 666 »). Les jeunes de Holy Monitor sont loin de pouvoir rivaliser avec leurs aïeules question pilosité, mais proposent d’autres solides arguments.

Reverb et tempos répétitifs associés à un chant gavé d’effets (vocoder principalement), ils proposent un Kraut-Space-Rock assez maitrisé, bien que, à la différence d’un MGMT qui sait disséminer ses effets sans avoir l’air d’y toucher, Holy Monitor ressemble parfois à un enfant au matin de Noël qui ne peut s’empêcher de jouer avec sa nouvelle console en portant un costume de Batman. Mais sachons profiter de ce trop-plein d’enthousiasme  et bichonner nos oreilles : du Farfisa de « Nemesis » envoyé pied au plancher à « Golden Light », avec orgue et tempo martial rappelant inévitablement les Black Angels, jusqu’à « Cacti », qui envoie Anton Newcombe directement en maison de retraite, tout est riche, et tout est beau. Les beats motorik de « Bend The Trees » et « Ice Giants » incitent à s’agiter et les quelques notes de guitare introduisant « Bed Of The Earth » nous ferait presque dire qu’une distorsion parfaite suffirait à faire une bonne chanson.

 

Grand soin est également porté aux textes tantôt écolos, souvent cosmiques, ainsi qu’aux vidéos, telle la très réussie (d’autant plus quand on imagine que c’est un petit budget) « Golden Light » avec ses filtres et ses collages (là encore, profusion d’effets) qui, elle, traite d’obsession pour une femme… qu’on devine un peu spéciale. Citons également les interludes que sont « The Vine » et surtout « Icarus », deux superbes mises en orbite des chansons subséquentes, qui participent à l’homogénéité de l’album, et font de ce premier acte une oeuvre complète, un véritable monolithe sonore envoyé loin, sur une planète désertique qui ressemblerait à celle de la pochette.

Holy Monitor – 2018

Traklisting:

  1. Halcyon
  2. Nemesis
  3. Bed Of The Earth
  4. The Vine
  5. Golden Light
  6. Αφροδίτη
  7. Bend The Trees
  8. Icarus
  9. Ice Giants
  10. Cacti