Premier album solo du producteur des Cypress Hill, Dust dévoile une nouvelle facette de ce personnage à part dans l’univers du hip hop US. DJ Muggs signe là un pur album de chansons, dont les samples torturés sont agrémentés des voix magnifiques de Greg Dulli et Everlast.


Fermez les yeux, laissez vous bercer par la douce voix susurrante d’Amy Trujillo, chahuter par les accents âpres de Greg Dulli et les emportements des guitares, vous écoutez le dernier album de … DJ Muggs.

Il nous revient en solo avec un album inclassable. Désireux de s’ouvrir à d’autres horizons, il abandonne le temps d’un album ses rudes compères de Cypress Hill. Que tous les fans (dont je fais partie) se rassurent, la formation de L.A reviendra néanmoins dès l’automne avec une nouvelle mise au point discographique en ces temps où le hip hop se mord trop souvent la queue. Que les plus suspicieux approchent, la plus belle des surprises se dissimule derrière le voile de Poussière (Dust). Les aficionados ne seront pas surpris par la voie nouvelle qu’emprunte Muggs, certainement un des DJ les plus créatifs de sa génération.

Sa participation à l’album de Tricky Juxtapose en 1999 avait déjà témoigné d’une volonté de ne pas s’enfermer dans un costume trop étroit pour lui. Un pas supplémentaire est franchi dans l’expérimentation avec cet opus. Les guitares disputent la vedette aux sons les plus électroniques disposés en toile de fond, ou sur le devant de la scène comme dans le très surprenant « Chasing shadows ». L’ensemble peut parfois dérouter, même paraître artificiel, mais de véritables trésors sont à découvrir. La palette de ses possibilités paraît en tout cas d’une largeur incroyable, les genres s’entremêlent et se disloquent, seule la noirceur l’emporte. Hip-hop, trip hop, pop, peu importe, l ‘important est de se laisser noyer dans cet ocean de mélancolie éruptive.

Le joyau est sans aucun doute « Fat City ». Greg Dulli, l’ex chanteur des Afghan Whigs, y apporte sa touche de sensualité morbide. Un tube (ce n’est pas un gros mot) potentiel. On retrouve aussi un vieux camarade, un de ces inclassables chanteurs que le hip hop à lui tout seul ne pouvait plus contenir, parti sur les routes avec sa seule guitare et sa voix éraillée : Everlast, ex-leader de House of pain, l’un des plus grands groupes de rap blanc (peut-être même le seul à ce niveau) dont Muggs fut le DJ. Les productions vocales sont toutes de grande qualité et malgré leur diversité, n’enlèvent aucune cohérence à l’album. On retrouve aussi ce parfum de mysticisme cher à Muggs, très présent notamment dans le fameux Temples of Boom de Cypress Hill.

Muggs est un génial bidouilleur, un as du collage. Un DJ tout simplement, c’est à dire un créateur.