Double album en publique de cette formation emblématique des années 80, ce Live At The Academy confirme le retour miraculeux de la bande à Mark Burgess après une absence de près de 12 ans.


« L’habit ne fait pas le moine ». L’expression n’aura jamais pris autant de sens lorsqu’on évoque la carrière des Chameleons. Voilà le genre de groupe que l’on adorerait faire écouter à ses proches, mais dont on n’ose montrer la pochette de peur de s’entendre réprimandé : « hey! Mais c’est du rock progressif! ». Et pour cause : l’artwork de Reg Smithies (un des guitaristes du groupe) est digne d’un Genesis du début des années 70. Oui, pas de quoi pousser des cris d’extases. Le plus étonnant, c’est que Mark Burgess en remet une couche et vante à chaque occasion les talents de l’artiste dans les crédits du livret! On croit rêver!

L’incident peut paraître minime, mais la carrière des Chameleons repose sur ce malentendu. Un groupe phénoménal, auteur de trois albums indispensables durant les années 80, mais boudé par une audience les confondant immanquablement avec la scène néo-progressive et autres somnifères vendus sans prescription. Il s’agit pourtant ici de musique post-punk et pas des moindres. Des groupes de l’acabit des Psychedelic Furs, The Sound ou un peu plus tard House Of Love.

Pour donner un repaire aux néophytes, The Chameleons furent aux années 80 ce que Radiohead période The Bend fut la décennie suivante (le succès en moins évidemment). A savoir, un groupe de rock doté d’une paire de guitaristes tout bonnement hors du commun, d’une voix émouvante et d’un goût prononcé pour l’expérimentation, sans jamais devenir plombant.

Reformé en 2000 après douze ans d’absence pour quelques concerts, le groupe s’est ensuite retrouvé en studio pour un album en demi-teinte, Why Call It Anything? (2001). En toute logique, la cuvée 2002 est un témoignage de la tournée qui suivit le quatrième album du groupe en 22 ans de carrière! Mis à part quelques oublis (au hasard One Flesh, Nostalgia) les classiques du groupe sont au rendez-vous, la magie est intacte et demeure impressionnante.

Certaines antiquités comme Up The Down Escalator ou Second Skin prennent même une cure de jouvence bienvenue. Devant une telle « masse sonore », on se rend d’ailleurs compte combien l’influence de ce groupe fut déterminante sur d’autres formations comme My Bloody Valentine et la mouvance Shoegazer. Seul véritable petit point faible de ce disque mémorable : les interventions « dub » du percussionniste sur un ou deux titres, qui ne parviennent tout de même pas à nous gacher notre plaisir.

Enfin, il faut aussi insister sur le fait que contrairement à la majorité des groupes de la mouvance Post punk, les Chameleons étaient un redoutable rouleau compresseur scénique. Malgré la pléthore d’albums live parues après leur séparation, le groupe n’a jamais bénéficié d’un enregistrement à la hauteur de leur prestation. C’est aujourd’hui chose fait. Un des meilleurs live enregistré ces dernières années avec celui de Built To Spill.

PS : Petite anecdote, l’album a été mixé par Alan Leach du groupe Shed Seven (tiens? Il était passé où celui-là?).