Qui a dit qu’en Allemagne le garage rock était synonyme de néant ? Il faudra sérieusement réévaluer son jugement après l’écoute de ce brûlot dans la droite lignée d’un Radio 4, Clash and co. Hail!


Super la pochette en forme de glace de salle de bain! Justement j’en avais besoin d’une au bureau… Bon, trêve de plaisanterie et parlons rock, parlons bien.

Pour les néophytes, le rock en Allemagne est surtout l’affaire de formations aux guitares bien heavy qui tâchent tel Rammstein, Scorpions, Accept… le genre de groupes qui ne nous traversent jamais l’esprit, mis à part une pensée charitable en visionnant Spinal Tap entre copains… Bref, hormis ce cas de figure, pas de quoi soulever notre intérêt.

Dans le Nord de l’Europe, on sait la Suède et la Norvège fertiles en combos garage (The Hives, Hellacopters, Gluciefer ou les pionniers Turbonegro…). De l’Allemagne, on retient surtout les ancêtres Kraftwerk et Can, une certaine scène electro-clash Berlinoise et l’excellent catalogue du label Morr Music. On l’aura bien compris, la renommée musicale du pays s’inscrit davantage vers l’électro que le rock tendance MC5, Stooges et consorts.
C’était sans compter sur un petit électron libre au doux patronyme de The Robocop Kraus (quelle légèreté!). Le menu proposé ici est alléchant : 25 ans d’héritage punk digne d’un Clash, mêlé à l’urgence mélodique d’un fugazi et digéré à la sauce revival garage. Attention l’indigestion!

« Encore un énième combo garage qui veut s’accaparer la part du butin! » j’entends déjà s’exclamer un perfide albion au fond à droite. Sauf que ces cinq trublions là n’ont pas pris le train en marche, loin de là. Le groupe, formé à Nuremberg totalise cinq ans d’activismu rock.

Ce qui nous emballe d’entrée avec ce groupe, c’est que là où d’autres sont soucieux du détail « in » irréprochable histoire de ne pas se prendre une volée de bois blanc par les critiques, The Robocop Kraus sonne « cool » sans prise de tête. Oui, ces mecs sonnent spontanés.


« c’est peut être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup »

Un état d’esprit qui se vérifie depuis leurs débuts en 1999 avec album concept assez gonflé sur « La fin de notre sinistre monde » (à faire pâlir de jalousie les Texans de Lift to Experience). De multiples line-up se succèderont avant que le groupe ne se stabilise autour de Thomas Lang (également patron du label Swing Deluxe records), Matthias Wendl, Johannes Uschalt, Markus Steckert (orgue) Tobias Helmlinger (basse). Après quelques essais dans la langue de l’inspecteur Derreck, le groupe opte finalement pour l’anglais. Résultat radical!

2001, le très solide album Tiger publié chez Day after records, permet d’ouvrir une plus large reconnaissance. L’année 2002 est faste pour le groupe qui nous revient d’une tournée aux Etats Unis et Japon. Mais le succès reste cloisonné. Barrière de la nationalité? Une chose est sûre : pendant que certains groupes médiocres comme les Whirlwind Heat sont encensés parce que Jack White a osé y prêter une oreille, d’autres bien meilleurs rament. La vague garage a ses avantages et ses inconvénients et c’est ce qu’on appelle clairement le revers de la médaille. Espérons que ce nouvel album changera la donne.

Avec Living with other people, The Robocop Kraus se profile désormais dans la mouvance d’un Radio 4 ou The Rapture pour cette volonté de faire bouger les dance-floor avec du rock sec.

« Fake Boys » est troublant de similtude avec les derniers rejetons New-Yorkais : basse très lourde, guitare épileptique et surtout, ce beat, qui procure TOUT sauf des fourmis dans les jambes. Un rythme enlevé et pratiquement omniprésent tout au long de cet album. Ces autres robots germaniques – les premiers restant Kraftwerk – ont même pondu un hymne digne des Clash avec le tonitruant « Apes haping apes ».

Plus accessibles que les Brooklinois cités plus hauts, les Robocop Kraus n’ont pas peur de se frotter à d’autres ambiances. « Audience » est un joli interlude électro tandis que « Things Don’t work that way » et « Mario Lanza », sont carrément pop et tranchent par rapport au ton général de l’album avec refrains contagieux, orgue sautillant et arpèges rigolots. Et puis que dire de ce « Tips for Performers » qui clôt l’album avec brio et promet déjà de belles frayeurs sur scène.

Enfin, pour assurer que cet album ne passe pas à la trappe, j’invite tous les disquaires indés de la Fnac à poser le sticker DFA records sur la pochette de Living with other people, histoire de convertir certains snobinards qui pensent que les meilleurs groupes viennent uniquement de Brooklyn. Car si la supercherie marche, on aura certainement affaire à l’album de l’année. En attendant, voici le meilleur album de rock ce mois-ci… jusqu’au prochain outsider.

-Le site de The Robocop Kraus