Un ancien groupe de rock tente d’exhumer cette pop sixties merveilleuse teintée d’arrangements et psychédélisme gracieux. Un petit trésor qui concerne les acharnés de mélodies élégantes et exigeantes.


Voilà une excellente surprise ! Forcément, avec le train-train grisâtre de la rentrée – et ce malgré nos rituelles bonnes résolutions – il nous manquait un disque frais et innocent de cet acabit. Car The Witch Hazel Sound, dépoussière l’innocence 60’s et les pop-song orchestrales tant fantasmée par les pop addicts mais rarement approchée ces trente ans dernière années.

Tout comme les High Llamas, The Witch Hazel Sound semble sérieusement perturbé par les années 60, les orchestrations diaboliques de Jimmy Webb et Burt Bacharach, les perfect songs magnifiées par The Association, Harper Bizarre, Beach Boys, Left Banke et quelques autres. Bref, cette musique qui touche du doigt le divin.

Formé il y a plus de dix ans, ce groupe américain originaire de Cleveland a d’abord fait dans la pop shoegazer tendance Moose/Boo Radleys, puis a petit à petit dérivé vers des arrangements scintillants et plus nobles. Avec seulement trois albums derrière eux (celui-ci inclus), The Witch Hazel Sound a connu plusieurs remaniements de personnel, mais reste jusqu’à ce jour concentré autour de Kevin Coral, grand manitou et compositeur principal.

Déjà sorti en 2001, This World, Then the Firewoks bénéficie trois ans plus tard du parrainage du petit label épicurien Euro-visions (au passage, j’ai cru d’abord être sollicité comme jury par l’eurovision lorsque j’ai reçu le plis dans ma boite au lettre, on vous rassure rien à voir ici avec le fameux programme kitsh tv), qui a décidé de nous donner des cours de rattrapage en distribuant la galette pour la première fois dans nos contrées et ainsi faire partager au plus grand nombre ce petit trésor de pop enchanteresse.

A la fois de bon goût d’un point de vue vintage et d’une accessibilité sophistication pop les rapprochant des méconnus Cardinal, The Witch Hazel Sound produit certes une pop très référencée mais parvient également aussi à distiller quelques notes psychédéliques contemporaines grâce à ses racines rock indépendante. Sans bénéficier d’un véritable orchestre symphonique de coutume pour ce genre de production, le groupe parvient sans peine à atteindre ses ambitions, les synthés biscornus apportant à l’ensemble un parfum/parfait des plus plaisants. Le charme prend, on se laisse vite happer par les mélodies cotonneuses de “Halo Of Brass”, les trompettes divines de “Music Became Vibration”, ou les cordes vertigineuses de “Blue City”.

On sent bien que cet objet minutieux résulte d’un travail acharné et que les trois années nécessaires à l’accomplissement de cet album sont certainement dues à un manque de moyens. Rien que pour cela, Kevin Coral est un homme enviable et intègre, qui tente tant bien que mal de rester fidèle à ses principes et à sa vision personnelle de ce que doit être une pop-song digne de ce nom.

Ce grand rêveur possède un timbre de voix plutôt timide qui se rapproche de Dean Wareham (bientôt ex/Luna), et colle magnifiquement avec le spleen de ses mélodies, notamment sur les immédiats “Fireworks” et “Kiss me Monster”, ou la précieuse ballade “Sun Horse Moon Horse.”

Alors oui, à l’écoute de ce genre de disques, deux sentiments opposés nous partagent généralement: Premièrement : l’impression d’avoir déjà entendu chaques notes de ces chansons à travers les classiques des grands noms déjà cités plus haut dans cette chronique.
Secondo : le bonheur de déterrer un trésor enfoui, quelque chose qui semble ne plus avoir cours de nos jours, un travail d’orfèvre artisanal que l’on pensait perdu à jamais. On vous rassure tout de suite, on tend vers cette deuxième option.

* Sur cette nouvelle édition, trois inédits ont été rajoutés, dont un envoûtant « For Isabelle Huppert » digne de la beauté légendaire de la muse.

-Le site du label Euro-Visions