Les duos féminins minimalistes ont le vent en poupe aux Etats-Unis depuis l’avènement de CocoRosie. Christy & Emily, nouvelles prétendantes au trône, ont uni leurs destins à Brooklyn après avoir écumé qui les petites scènes californiennes, qui les salles de conservatoire, scellant leur amitié sous un sceau marqué à l’effigie de Nico. Gueen’s Head, leur premier album, dénote en effet une étude acharnée du petit Velvet Underground banané illustré. Mêmes guitares répétitives, mêmes voix fatiguées et lancinantes, même appétence pour les ambiances enfumées, “Sunday Morning” en hymne incontournable. Mais Christy & Emily, sans se laisser totalement étouffer par une influence aussi écrasante (et, à ce niveau, osée), ne privent pas leurs chansons d’une grâce et d’une douceur cotonneuses qui adoucissent le propos. L’ascétisme forcé les pousse à ne pas s’épancher inutilement. Leur manque de moyens s’est transformé en atout, et fortes d’un talent de mélodistes incontestables – on pense beaucoup, sur ce plan, aux débuts hésitants et touchants de Laura Veirs – elles posent délicatement leurs voix sur des chansons jouées sur la pointe des pieds. Ourlant leur musique d’un Wurlitzer économe ou d’un piano usé, elles semblent jouer le regard tourné vers un crépuscule flamboyant. Tant et si bien que brutalement on croit entendre Mazzy Star interprétant des standards de June Carter – “Signs” -, ou encore deux hypothétiques filles naturelles qu’Elvis aurait abandonnées lors de ses pérégrinations hawaïennes – “Island Song” la bien nommée. Soit un surprenant voyage dans le temps uniquement basé sur des instrumentations chiches, sans que la musique n’en pâtisse, preuve d’une qualité d’écriture certaine. Gare toutefois à ne pas se laisser porter par une éventuelle reconnaissance artistique trop hâtive, à ne pas gâcher un style rafraîchissant et somme toute très agréable à entendre aujourd’hui, privilégiant une évolution saine et ambitieuse, sous peine de basculer dans la recette facile et finir par s’autoparodier comme les soeurs Casady aujourd’hui.

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