Dans un buzz assourdissant, des Français un peu salaces sur les bords nous jouent le retour de la new wave. De quoi être sur ses gardes.


Exhumer le spectre de la new wave avec des morceaux naïfs mais à l’attractivité immédiate : tel est le défi, de taille, que se sont lancés les Teenagers. Mais il y a des moments comme ça où on a du mal à y croire. Sur la foi de deux singles sortis l’an dernier, “Homecoming” et “Starlett Johansson”, les Teenagers, sorte de dandys cools, ont déchaîné les espoirs les plus fous, s’attribuant le statut du « groupe frenchy cool en devenir ». Mais tient-on là un réel dandysme à la Jarvis Cocker de Pulp, efficacité musicale à l’appui, ou une posture façonnée sur l’autel du mercantilisme ?

Revenons au début. Originaires des Hauts-de-Seine, les Teenagers sont Michael Szpiner, Dorian Dumont et Quentin Delafon… et viennent d’Internet. Dans la nuit de Noël 2005, le trio a, sans réfléchir, livré une chanson à la communauté MySpace. De sites en blogs ou forums, leur renommée est allée crescendo. Jusqu’à ce premier opus, Reality Check.

Une base electro-rock à guitares, un refrain choral formaté, du chanté-parlé non-stop, des synthés kitschs à mort, et des thèmes cochons-branchouilles – se taper une Américaine, épouser Scarlett Johansson, faire la bringue, se faire larguer, le spring break – tel est le fond de commerce des Teenagers. Extraits : « I fucked her, and it was wild. She’s such a slut » ou « I fucked my american cunt ». Partout, des voix s’élèvent pour asséner : « les Teenagers c’est Bret Easton Ellis , Les Lois de l’Attraction ». Pour les sujets c’est possible, mais pour leur exploitation, cela tient plus de Porky’s ou de American Pie. Et tout est en anglais, bien sûr car, comme expliqué par les principaux protagonistes dans les Inrocks, « Fuck », ça sonne mieux que « baise ». Forcément…

Le doute nous envahit aussi tant le buzz qui précédait le groupe était stupéfiant, un cas d’école. Tout est réglé comme une belle horlogerie, taillé pour le commerce, une machine de guerre, du tout cuit pour les magazines dans le vent : des Frenchies Love Love qui cartonnent à l’étranger, une mayonnaise montée à la MySpace, une identité indie sous l’aile d’un label d’outre-Manche (Merok pour XL Recordings) et des morceaux à la longueur formatée. Ils chantent en anglais, vivent en Angleterre, accumulent les fans à l’étranger et tournent aux Etats-Unis…

« Ca s’appelle Phoenix et ça existe non ? ». Ben non, Phoenix a quelque chose derrière, une conscience musicale sur laquelle les Teenagers se sont assis. Car c’est bien là que le bât blesse. Leur electro pop est prétentieuse, lassante et hormis deux ou trois titres, ne va pas chercher bien loin. On apprécie “Homecoming”, lecture hédoniste d’une génération insouciante, “Starlett Johansson”, un témoignage des désirs adolescents ou “Fuck Nicole”, son refrain plus licencieux et rageur.

Pour le reste, les Teenagers évoquent ici et là la fraîcheur d’une jeunesse sans complexe avec des sujets simples, des phrases simples… et surtout des mélodies sans génie. Au détour des compos, la platitude et la monotonie sont omniprésentes. On comprend tout à fait lorsqu’ils expliquent mettre à peine quelques heures pour composer un morceau. Ils devraient peut-être s’y atteler quelques heures de plus.

Le verdict est sans appel. Reality Check, dont on connaissait déjà les bonnes bribes, est insipide. D’autres efforts seront indispensables aux Teenagers pour finir comme New Order et non comme Modern Talking. Et de notre côté pour nous laisser emporter par cette nouvelle nouvelle vague.

– Leur Myspace